La Scala 2018/2019 : Italie, Woody, Bartoli et tutti quanti
Comme toujours, la saison de La Scala s’ouvrira le 7 Décembre (jour du saint-patron de Milan, Saint-Ambroise). En 2018/2019 le premier opus sera Attila de Verdi, dirigé par Riccardo Chailly (directeur musical de l'institution), mis en scène par Davide Livermore avec Ildar Abdrazakov dans le rôle-titre, Saioa Hernández en Odabella, Simone Piazzola en Ezio et comme toujours, le Chœur et l'Orchestre des lieux. Autre Verdi, La Traviata rend immédiatement amoureux de sa distribution vocale : Violetta Marina Rebeka et Sonya Yoncheva alternant, tout contre Francesco Meli/Benjamin Bernheim, ainsi que Leo Nucci/Plácido Domingo ! La mise en scène sera confiée à Liliana Cavani (nouvelle belle initiative que de choisir une réalisatrice, comme c'était le cas, dans ce même lieu et même opus trois saisons plus tôt, avec la production de Sofia Coppola) et Myung-Whun Chung tiendra la baguette, avec, à noter, la présence du Corps de Ballet.
Bien entendu, d'autres opus de Verdi sont programmés : I Masnadieri (Les Brigands dont nous vous avons rendu compte à Monte-Carlo) seront mis en scène par David McVicar et menés par Michele Mariotti, avant que Rigoletto n'apparaisse sous les traits du chanteur devenu l'incarnation vivante de ce rôle : Leo Nucci. Cet artiste est à ce point devenu une institution, que de persistantes rumeurs affirment qu'il s'agira là de ses adieux à la scène ! Ce sera en tout cas l'occasion de transmettre son génie à ses partenaires, les solistes, instrumentistes, choristes et danseurs de l'Académie du Teatro alla Scala (mise en scène Gilbert Deflo, direction musicale Nello Santi).
Mais les autres grands maîtres italiens ne seront pas en reste. La Cenerentola de Rossini sera dirigée par Ottavio Dantone (comme à Paris et comme il nous en parlait en interview), dans la mise en scène classique de Jean-Pierre Ponnelle avec, autre occasion de féliciter nos compatriotes : Marianne Crebassa en Angelina, fièrement entourée par Maxim Mironov, Carlos Chausson, Nicola Alaimo, Erwin Schrott et Alessandro Spina.
Puccini offrira le destin tragique de Manon Lescaut mis en scène par David Pountney et à nouveau dirigé par Riccardo Chailly (pour sa deuxième fois mais aussi l'ultime de la saison : la marque d'un directeur musical discret en salle). Le duo vocal promet, avec la Manon de Maria José Siri et le Des Grieux de Marcelo Álvarez (sans oublier Lescaut par Massimo Cavalletti).
Le répertoire d'opéra regorge d'opus durant moins d'une heure (à retrouver dans notre série #AirduJour) et que les maisons regroupent donc pour former une soirée. La plus célèbre de ces unions est CavPag, mais bien d'autres combinaisons sont possibles. Rien que le mois dernier, Paris et Tours ont respectivement réuni L'Heure espagnole de Ravel avec Gianni Schicchi de Puccini, puis Mozart et Salieri de Nikolai Rimski-Korsakov avec Iolanta de Piotr Tchaïkovski. Justement, La Scala unira avec Gianni Schicchi un autre opus de Salieri : Prima la musica, poi le parole. Si le généreux baryton italien Ambrogio Maestri (entouré de l'Académie) chantera dans les deux spectacles, c'est la mise en scène de Woody Allen qui fait d'ores et déjà parler d'elle, pour son contenu (inspiré de Little Italy à New York, opérant donc un lien transAtlantique) mais aussi pour son contexte, (le célèbre cinéaste faisant partie des nombreux individus dernièrement accusés d'agressions sexuelles, mais étant donné qu'il est présumé innocent et qu'il continue à travailler aux États-Unis, La Scala a fait savoir qu'elle n'avait pas de raison d'annuler cette production).
L'Élixir d'amour de Donizetti conduit par Michele Gamba dans une production de Grischa Asagaroff offrira à René Barbera une pause dans le répertoire Rossini qui "ne le rend pas heureux". Il alternera avec Vittorio Grigolo, aux côtés de Rosa Feola, Ambrogio Maestri, Massimo Cavalletti.
Le répertoire ne sera pas que national, puisque La Scala convoque aussi un opéra de Mozart (mais en italien) Idomeneo, re di Creta (Idoménée, roi de Crète) mis en scène par Matthias Hartmann avec notamment le suisse Bernard Richter et la québecoise Michèle Losier, direction Christoph von Dohnányi.
Jules César de Haendel offrira à Cecilia Bartoli l'occasion de faire son grand retour à Milan (7 ans après y avoir été sifflée par une partie de l'auditoire). Elle incarnera Cléopâtre avec pour César Bejun Mehta, Cornelia Sara Mingardo, et deux des plus célèbres contre-ténors : Philippe Jaroussky en Sesto et Christophe Dumaux en Tolomeo, le tout dirigé par Giovanni Antonini dans une mise en scène de Robert Carsen.
L'Ariane de Richard Strauss voyagera à Naxos menée par Franz Welser-Möst, conçue par Frederic Wake-Walker, avec, autre cocorico, Sabine Devieilhe en Zerbinetta (comme cet été à Aix-en-Provence, un spectacle à réserver ici). Un autre détail -amusant- est à noter dans cette production : le Surintendant de La Scala, Alexander Pereira montera sur scène en personne, pour incarner... le Majordome !
Un cap vers la Russie avec La Khovanchtchina de Moussorgski permettra justement une rencontre russo-italienne, entre le chef Valery Gergiev et le metteur en scène Mario Martone avec Mikhail Petrenko, Ekaterina Semenchuk, Evgenia Muraveva, et un casting slave.
Pour la première fois de son histoire, La Scala proposera Die tote Stadt de Korngold, conduite par Alan Gilbert, conçue par Graham Vick avec Klaus Florian Vogt. L'autre création locale conclura la saison : Hélène d'Égypte de Richard Strauss, dirigé à nouveau par Franz Welser-Möst mis en scène par Sven-Eric Bechtolf.
La Scala offre également l'une des saisons les plus fournies en matière de récital, ouvrant par le baryton Christian Gerhaher (pour le Voyage d'Hiver de Schubert), avant que la mezzo-soprano française Marianne Crebassa ne fasse voyager par-delà les Alpes son programme exotique avec Fazil Say, le ténor Fabio Sartori défendra ses traditions nationales (Rossini, Verdi, Leoncavallo, Mascagni, Tosti), le baryton Luca Salsi ouvrant aussi vers l'Allemagne (Salieri, Beethoven, Donizetti, Liszt, Respighi, Verdi), vers la Russie pour la soprano Krassimira Stoyanova (Verdi, Puccini, Catalani, Cilea, Mascagni, Tchaikovsky, Hadjiev) avant sa collègue de tessiture Jessica Pratt, à l'extrême inverse de la basse Günther Groissböck.