Comédies, Tragédies, Walkyrie : Chevauchées lyriques en Suède pour 2019-2020
Le mois d’octobre verra la première nouvelle production de la saison, qui marque le retour d’Un son lointain (Der ferne Klang) de Franz Schreker, compositeur autrichien qui revient enfin au répertoire de la maison après la dernière représentation de la même œuvre en 1927. Les Stockholmois pourront (finalement) profiter des débuts in loco d’Agneta Eichenholz, qui interprétera le rôle de Grete aux côtés de Daniel Johansson (en Fritz) sous la direction du chef suisse Stefan Blunier dans une mise en scène de Christof Loy. Ce dernier (dont l’Alcina était présentée aux Champs-Élysées l’année dernière) a également signé La Fille du Far-West, qui sera reprise à la fin de la saison avec Alan Gilbert dans la fosse et une distribution comprenant Malin Byström (Minnie), Aleksey Bogdanov (Jack Rance) et Andrea Carè (Dick Johnson).
La deuxième première sera celle de La Traviata conçue par Ellen Lamm et dirigée par Domingo Hindoyan (époux de Sonya Yoncheva). Karl-Magnus Fredriksson et Ida Falk-Winland, qui ont connu un grand succès dans Rigoletto la saison dernière reviendront avec le jeune Norvégien Bror Magnus Tødenes (doux ténor argenté), qui fera ses débuts dans la maison en Alfredo. Un autre "débutant" sera Candide, l’opérette de Leonard Bernstein, qui sera joué et chanté par une distribution locale sous la battue Stefan Klingele et le metteur en scène norvégien Ole Anders Tandberg verra en outre revenir sur scène deux de ses interprétations mozartiennes : La Flûte enchantée et Les Noces de Figaro. Très attendue est la prise de rôle de Christina Nilsson en Comtesse (dans Figaro), ainsi que son retour dans le rôle-titre d’Aida, qu’elle chantera aux côtés de Daniel Johansson. Parmi les autres reprises –La Cenerentola de Rossini (avec Michele Angelini en Don Ramiro), Carmen et Eugène Onéguine (dirigé par John Fiore)- ce sont les sept représentations de La Walkyrie qui représentent le temps fort de la saison : Constantin Trinks et Alexander Vedernikov en alternance en tant que chefs d’orchestre, Iréne Theorin en Brünnhilde et Greer Grimsley (habitué de Bayreuth et du Met) en Wotan, ainsi que Joachim Bäckström et Cornelia Beskow en jumeaux-amants Siegmund et Sieglinde. En avril, la maison accueillera Iolanta, cette œuvre rare de Tchaïkovski sera donnée dans la mise en scène de Sergei Novikov, conçue pour l’Opéra Hélikon de Moscou.

Les
maisons d’opéra de Malmö et Göteborg présentent en 2019-2020
deux programmations différentes qui ont néanmoins quelques points
communs. Premièrement, les opéras partagent le plateau avec les
comédies musicales pour les deux. À Malmö, il s’agit de La
Belle et la Bête
d’Alan Menken (d’après le film Disney pour lequel Menken
lui-même composa la musique) et Hedwig
and the Angry Inch,
tandis que Göteborg propose deux ouvrages adaptés d’après
Charles Dickens (Oliver !
et
Un
chant de Noël).
Deuxièmement, chacune des deux maisons montera du Britten. Les spectateurs de Malmö verront renaître l’interprétation du Songe d’une nuit d’été qui a vu le jour à Glyndebourne en 1981. Lynne Hockney, alors chorégraphe dans l’équipe artistique de Peter Hall, s’occupera de la réalisation de cette mise en scène légendaire. Anja Bilhmaier dirigera une distribution jeune et principalement locale, avec le contre-ténor sud-africain Christopher Ainslie en Oberon. Göteborg accueillera un opus moins joyeux : Mort à Venise. À David Radok, metteur en scène prolifique aux théâtres de Göteborg et de Brno (et dont l’Arsilda de Vivaldi a fait un petit « tour de France » en 2017), est confié cet opéra en deux actes d’après Thomas Mann. Le ténor britannique Paul Nilon y incarnera Gustav von Aschenbach, soutenu par la direction de Steuart Bedford.
Troisième point commun : la présence de grandes tragédies romantiques, notamment celles de Puccini. Malmö fêtera sa nouvelle Tosca confiée à Sofia Jupither tandis que la reprise du même opus à Göteborg (interprété par Lorenzo Mariani) s’effectuera par une distribution locale sous le bâton d'Henrik Schaefer, qui y dirigera aussi une nouvelle production de La Bohème (en alternance avec Karen Kamensek). Max Webster est responsable de la mise en scène. Deux autres tragédies marqueront la fin de l’année 2019 à Göteborg. D’abord, Carmen (dans une mise en scène de David McVicar ranimée par Marie Lambert) sous la direction musicale de Patrik Ringborg, puis La Walkyrie, deuxième opéra du Ring écologiquement durable qu’est en train de monter Stephen Langridge dans cette maison. Sieglinde sera confiée à Elisabet Strid et d’autres chanteurs présents dans L’Or du Rhin, qui seront ainsi « recyclés » : Brenden Gunnell se transformera de Loge en Siegmund et Mats Almgren de Fafner en Hunding, tandis que Anders Lorentzon et Katarina Karnéus donneront de nouveau leurs corps et voix à Wotan et Fricka. Annalena Persson assumera le rôle de Brünnhilde et Evan Rogister prendra la baguette.
Côté comédies, Göteborg donnera l’occasion au public de se réjouir d’un Figaro repris (par Langridge) et d’un Così en tournée, alors que l’Opéra de Malmö suivra l’exemple de Stockholm (qui a eu un grand succès avec une Veuve joyeuse adaptée, traduite et modernisée par un fameux comédien suédois) en employant le même modèle pour la célèbre opérette d’Offenbach : le jour de la Saint-Valentin 2020, Orphée descendra aux enfers dans une version façonnée par Elisabeth Linton (mise en scène). La distribution suédoise comprendra de jeunes artistes ainsi que des noms bien connus pour les spectateurs suédois, dont Carl Johan Falkman (qui incarna jadis Escamillo dans La Tragédie de Carmen de Peter Brooks !) et Rickard Söderberg, chanteur d’opéra et personnalité médiatique, qui arrangera d’ailleurs des soirées sing-along pour inviter de nouveaux publics à faire connaissance avec l’art lyrique.
L’opéra contemporain La Sonate d’automne de Sebastian Fagerlund d’après le film homonyme d’Ingmar Bergman initiera la saison 2019-2020 à Malmö dans la mise en scène originale de Stéphane Braunschweig. Erika Sunnegårdh et Helena Juntunen reprendront leurs rôles respectifs, tandis que Charlotte Hellekant et Fredrik Zetterström remplaceront Anne Sofie von Otter et Tommi Hakala, qui ont participé à la création mondiale en 2017.

Les trois maisons d’opéra offriront toutes en outre un programme jeune public et de concerts. Sont surtout à mentionner les concerts à Stockholm en hommage à Jenny Lind, Prisoner of the State l’opéra de David Lang donné à Malmö en version de concert avec le chef Steven Sloane, et La Ville morte de Nadia Boulanger et Raoul Pugno (sur un livret de Gabriele D’Annunzio, à ne pas confondre avec l’opéra d’Erich Korngold) sous la direction d’Anna-Maria Helsing, ce qui établit une admirable tradition de l’Opéra de Göteborg de jouer des opus peu connus de compositrices le 8 mars.