Dix grands psychopathes à l’opéra (6/10) - Lady Macbeth de Mtsensk
Lady Macbeth de Mtsensk : jusqu’où iriez-vous par amour ?
Ausrine Stundyte (Katerina) et Peter Hoare (Zinovyï) dans Lady Macbeth de Mzensk, Lyon, 2016 © Jean-Pierre Maurin
Le 17 décembre 1932, Dmitri Chostakovitch achève la composition de son opéra Lady Macbeth de Mtsensk qu’il dédie à son épouse. Inspirée de Lady Macbeth du district de Mtsensk de Nicolaï Leskov, cette œuvre reprend le fait divers qui avait inspiré l’écrivain russe, à savoir l’histoire d’une femme qui, pour précipiter un héritage, assassinat brutalement son beau-père. Alors que Leskov présentait son héroïne Katerina comme une femme dangereuse et venimeuse, Chostakovitch et le librettiste Alexander Preis ont préféré exprimer la tragédie et la complexité des sentiments de leur personnage dans une œuvre oscillant entre le drame et la farce.
Katerina Ismaïlova mène une vie triste et monotone auprès de son mari. Lorsque celui-ci est contraint de s’absenter pour plusieurs jours, il laisse son épouse sous la garde de son père mais fait aussi l’erreur de lui présenter son nouvel ouvrier, le séduisant Sergueï. Ce dernier réussit rapidement à charmer Katerina et à venir dans son lit, sous le regard furieux de son beau-père. Celui-ci, pour punir l’amant, le fouette et le jette à la cave. Mais Katerina en a décidé autrement et, afin de libérer son bien-aimé, empoisonne son beau-père avec des champignons assaisonnés de mort-aux-rats. Ce dernier a tout juste le temps de dénoncer sa meurtrière avant d’expirer. Seulement celle-ci n’en est pas à sa première tromperie et réussit à détourner les soupçons par un fourbe torrent de larmes.
Or c’était sans compter le retour de son mari qui l’accuse d’adultère. Alors, aidée de son amant, Katerina qui ne compte pas se laisser calomnier de la sorte, décide d’étrangler le pauvre homme et de cacher son corps à la cave. Les deux tourtereaux peuvent donc désormais convoler en justes noces. Tout se déroule pour le mieux jusqu’à ce qu’un grossier personnage découvre en allant chercher une bouteille de vin le corps en décomposition du mari et alerte la police. Désemparée, Katerina préfère tout confesser et le couple assassin en paye le prix, se retrouvant au bagne en Sibérie. Là-bas, Sergueï délaisse l’héroïne pour une autre jeune femme qui n’hésite pas à s’en vanter. Dans un dernier élan d’amour et de folie, Katerina se jette alors dans les eaux glacées d’un lac emportant la maîtresse avec elle.
Alors que l’opéra reçoit un très bon accueil des critiques réalistes et avant-gardistes, il est très mal perçu par Staline qui le fait interdire en Russie de 1936 jusqu’à sa mort. En cause : un trop plein de luxure non dissimulée, une esthétique trop expressionniste, mais surtout le caractère trop indépendant de l’héroïne, bien décidée à ne pas se laisser dicter son destin.
Ecoutez Nadine Secunde en Lady Macbeth de Mtsensk, à l’Opéra de Barcelone, en 2002
(cover : Ausrine Stundyte et John Daszak dans Lady Macbeth de Mzensk, Opéra de Lyon, janvier 2016 © Jean-Pierre Maurin)
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