100ème Saison pour le Teatro Real de Madrid
Après avoir sauvé des productions remarquées en 2020/2021 (nos comptes-rendus pour Un Bal masqué, Rusalka, Marie, Norma, Siegfried) dans une Espagne qui s’est efforcée de maintenir la culture vivante en pleine pandémie de Covid-19, le Teatro Real de Madrid, maison incontournable du paysage lyrique mondial de premier ordre, célébrera sa centième saison à renfort de 15 titres qui embras(s)ent cinq siècles d’opéra.
La 100ème saison lyrique madrilène s’ouvrira avec la belcantiste Cenerentola de Rossini du 20 septembre au 9 octobre. Le dramma giocoso du maître italien basé sur le conte de Charles Perrault Cendrillon, sera mis en scène par le norvégien Stefan Herheim et dirigé par Riccardo Frizza avec notamment deux fameux rossiniens hexagonaux. Karine Deshayes et Aigul Akhmetshina alterneront dans le rôle-titre, Florian Sempey partagera le rôle de Dandini avec Borja Quiza, Dmitry Korchak / Michele Angelini seront Don Ramiro, Renato Girolami / Nicola Alaimo Don Magnifico, Roberto Tagliavini et Riccardo Fassi Alidoro, Rocío Pérez et Carol Garcia respectivement Clorinda et Tisbe.
La saison se refermera sur un événement historique pour la maison, avec Nabucco de Verdi, le premier opéra du maître italien entendu dans la capitale espagnole (au Teatro Circo en 1844, deux ans après la création à La Scala de Milan), premières notes aussi à résonner dans le Teatro Real (pour les essais acoustiques avant l'ouverture de 1850) avant une première représentation in loco en 1853 (et sa dernière en date remonte à 1859). Programmé du 5 au 22 juillet 2022, Nabucco sera mis en scène par Andreas Homoki (une production de Zurich). Nicola Luisotti partagera la baguette avec Jordi Bernàcer, pour diriger un trio de rôles-titres en alternance composé d’Amartuvshin Enkhbat, George Petean et Luis Cansino, ainsi que les trios Anna Pirozzi, Saioa Hernández et Oksana Dyka en Abigaille, Dmitry Belosselskiy, Roberto Tagliavini et Alexander Vinogradov (Zaccaria), Silvia Tro Santafé, Elena Maximova et Daniela Mack (Fenena) et le duo Piero Pretti / Eduardo Aladrén pour Ismaele.
Puccini sera également à l’honneur cette saison avec La Bohème du 12 décembre au 4 janvier, dans la mise en scène de Richard Jones (notre compte-rendu à Londres). Nicola Luisotti reprendra ici la direction (cette fois remplacé deux fois par Luis Miguel Méndez), pour emmener Michael Fabiano (en alternance avec Andeka Gorrotxategi) et Ermonela Jaho (avec Eleonora Buratto) en Rodolfo et Mimi, avec Joan Martín-Royo et Manel Esteve (Schaunard), Lucas Meachem et Andrzej Filonczyk (Marcello), ou encore Krzysztof Baczyk et Solomon Howard (Colline).
Vériste toujours, le russophile Siberia d’Umberto Giordano sera porté les 6 et 9 mai en version concert par la diva qui en fait son nouveau grand rôle : Sonya Yoncheva (Estefania), avec son mari Domingo Hindoyan à la baguette. Bryan Hymel tentera de revenir de ses difficultés vocales (en Vassili), avec George Petean (Gleby), Elena Zilio (Nikona), Mercedes Gancedo (Niña) et Alejandro del Cerro (Prince Alexis).
Également en version concertante, le répertoire français sera représenté par l’exotique Lakmé de Léo Delibes les 1er et 3 mars sous la direction de Léo Hussain, avec les Français Sabine Devieilhe (Lakmé), Stéphane Degout (Nilakantha) mais également Xabier Anduaga (Gérald), Héloïse Mas (Mallika) ou encore David Menéndez (Frédéric).
L’Allemagne viendra avec un point culminant : le dernier épisode du Ring Wagnérien, Le Crépuscule des dieux mis en scène par Robert Carsen et dirigé par Pablo Heras-Casado (refermant du 26 janvier au 27 février la Tétralogie entamée lors de la saison 2018-2019), avec Andreas Schager et Ricarda Merbeth dans les rôles de Siegfried et Brünnhilde, Martin Winkler (Alberich), Amanda Majeski (Gutrune), Lauri Vasar (Gunther), Michaela Schuster (Waltraute) Stephen Milling (Hagen).
Le Teatro Real de Madrid proposera également pour cette saison trois opéras espagnols, à commencer par deux œuvres du XXIe siècle, Las Horas Vacias (Les Heures vides) de Ricardo Llorca du 9 au 14 novembre, créé en 2007. L’œuvre, entre polyphonie espagnole et minimalisme américain, qui suit la vie d’une femme enfermée chez elle et dans son imaginaire, sera proposée dans une nouvelle production du Teatro Real signée José Luis Arellano, avec la soprano Sonia de Munck, sous la direction musicale d’Alexis Soriano. Le Teatro Real a également décidé de proposer une nouvelle production du troisième (et dernier selon ses dires) opéra composé par Luis de Pablo, El abrecartas (Le coupe-papier), du 16 au 26 février par Xavier Albertí, avec Airam Hernández dans le rôle du poète espagnol Federico García Lorca, personnage principal de l’opéra, accompagné d’un casting 100% espagnol, et dirigé par Fabián Panisello.
La programmation espagnole de l’opéra madrilène se conclura avec la création d’Extinción, d’après les messes du moine bénédictin du XVIIe siècle Joan Cererols, repris par le groupe Señor Serrano accompagné de l’ensemble Nereydas, pour une proposition scénique qui mènera une réflexion sur l'extractivisme (extraction effrénée des ressources naturelles) au XXIe siècle, notamment à travers un dispositif multimédia.
XVIIe siècle toujours, avec le King Arthur de Purcell donné en "version de concert dramatisée" (par Isaline Claeys) le 27 mars par Vox Luminis de Lionel Meunier, et notamment la soprano Sophie Junker, le contre-ténor alto Jan Kullmann, le ténor Robert Buckland et la basse Sebastian Myrus.
Le Ballet royal de la nuit, créé en 2017 à Caen par l'Ensemble Correspondances de Sébastien Daucé reconstituant le ballet de jeunesse de Louis XIV, verra Lucile Richardot entourée de Caroline Weynants, Caroline Dangin-Bardot, Perrine Devillers, Deborah Cachet, David Tricou ou encore Étienne Bazola pour une version concert de cette œuvre exhumée qui fait résonner Francesco Cavalli et Luigi Rossi, notamment.
Après le XVIIe, le XVIIIe siècle sera représenté par la Partenope de Haendel du 13 au 23 novembre dans une mise en scène urbaine de Christopher Alden, sous la direction musicale d’Ivor Bolton. Brenda Rae incarnera le rôle-titre en alternance avec Sabina Puértolas, face à Iestyn Davies et Franco Fagioli en Arsace, Teresa Iervolino et Daniela Mack (Rosmira), ou encore Anthony Roth Costanzo en alternance avec Christopher Lowrey (Armindo).
Toujours dirigées par Ivor Bolton, Les Noces de Figaro par Lotte de Beer viendront du Festival d'Aix-en-Provence du 22 avril au 12 mai avec Vito Priante et Thomas Oliemans dans le rôle-titre, André Schuen et Joan Martín-Royo (Comte Almaviva), María José Moreno et Miren Urbieta-Vega (Comtesse Almaviva), ou encore Julie Fuchs en alternance avec Elena Sancho-Pereg dans le rôle de Susanna.
L’Ange de Feu de Prokofiev, transposé par Calixto Bieito dans la société des années de sa création posthume en 1950, mettra à l'affiche du 22 mars au 5 avril Ausrine Stundyte en alternance avec Elena Popovskaya dans le rôle de Renata, mais aussi Leigh Melrose et Dimitris Tiliakos (Ruprecht), Dmitry Golovnin et Vsevolod Grivnov (Agrippa von Nettesheim / Mefistófeles), ou encore Agnieszka Rehlis en alternance Olesya Petrova (La Madre Superiora / Vidente), le tout sous direction musicale de Gustavo Gimeno.
S'ensuivra l'oratorio également du XXe siècle Jeanne d'Arc au bûcher d’Arthur Honegger dans un double programme avec La Damoiselle élue de Debussy (avec Aude Extrémo et Camilla Tilling), du 7 au 17 juin. L'actrice Irene Escolar connue pour avoir incarné une autre Jeanne également née au XVe siècle (Jeanne Ire de Castille dite Jeanne la Folle) sera la pucelle d'Orléans dans la production mise en scène par Álex Ollé et dirigée par Juanjo Mena, avec également Sébastien Dutrieux (Père Dominique) Sylvia Schwartz (la Vierge), Elena Copons (Marguerite), Aude Extrémo (Catherine).
La saison lyrique madrilène se refermera le 27 juillet avec la deuxième incursion dans l'opéra (après Prima Donna) de l'auteur-compositeur-interprète canado-américain, Rufus Wainwright : Hadrian commandé par Alexander Neef à Toronto qui sera donné en version semi-scénique par Jorn Weisbrodt avec Scott Dunn à la baguette.
Plusieurs récitals et concerts événements rythment également cette saison madrilène. Juan Diego Flórez accompagné par le pianiste Vincenzo Scalera, interprétera entre autres une sélection de chansons et d’airs de Rossini, Donizetti, Bellini ou encore Gounod le 12 septembre. Le concert prévu le lendemain avec Anna Netrebko, Yusif Eyvazov et Elchin Azizov, et l'orchestre maison dirigé par Michelangelo Mazza pour un programme d’airs, de duos et de pièces orchestrales est pour sa part reporté au 25 juillet. S’ensuivront un concert Rossini et l’Espagne le 27 octobre avec la mezzo Olga Syniakova qui interprétera les airs écrits par le maître italien pour sa muse Isabel Colbran, et à partir de 2022, un récital de Lise Davidsen accompagnée du pianiste Leif Ove Andsnes qui interprétera des pièces d’Edvard Grieg, Richard Strauss et Richard Wagner, de la soprano Lisette Oropesa accompagnée de l’Orchestre du Teatro Real, ainsi que du contre-ténor vedette Jakub Józef Orlinski avec l'ensemble Il Pomo d’Oro, avant le concert des lauréats du 59e concours international Tenor Viñas le 19 juin avec l’Orchestre du Teatro Real dirigé par Daniel Montané.