Bruno De Sá & Dorothee Oberlinger : baroque virtuose à Ambronay
Au lendemain de la tragique disparition soudaine du baryton Alejandro Meerapfel en plein concert, la méditative Messe à cinq voix de William Byrd est venue offrir une après-midi de consolation appréciée par le Festival d’Ambronay endeuillé. Après l'hommage par le recueillement, et toujours en cette Abbatiale d’Ambronay vient celui par la passion musicale et sa lumineuse virtuosité, dans ce concert du soir réunissant flûte et voix pour des pièces d’Alessandro Scarlatti, Georg Friedrich Haendel, et Giovanni Battista Bononcini.
La voix de soprano naturelle de Bruno De Sá est fine et lumineuse. Le timbre offre immédiatement sa douce pureté, au vibrato bien dosé. Son chant s’élève, dans la finesse toujours, des aigus haut placés, tandis que le chanteur vient à s’asseoir en bord de scène, déployant même ainsi l’impressionnante longueur de son souffle soutenu. Pourtant, quelques fragilités croissent au long de la soirée, avec des notes qui ne s’émettent pas immédiatement, quelques instabilités et imperceptibles déraillements, menant vers une fatigue vocale touchant la justesse et la stabilité (mais pas les développements et conclusions, la virtuosité éblouissante se déployant aussi par la force de la concentration).
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Joyeusement complices, le chanteur et la flûtiste Dorothee Oberlinger rivalisent d’agilité gazouillante dans la grande tradition des duos/duels voix/instrument de l’époque baroque. Le sopraniste se munit même brièvement d'une flûte à coulisse, répondant à la flûtiste dans un esprit de légèreté tout à fait plaisant.
Dorothee Oberlinger montre en outre toute la diversité de la famille des flûtes à bec, de la basse à la soprano. D’autant qu’elle y déploie une aussi vaste gamme d’agilité (dans des transcriptions de concerto pour son instrument). Cependant, mais là aussi à l’unisson de son partenaire musical, le son perd un peu en soutien et en justesse.
L’Ensemble 1700 (fondé par Dorothee Oberlinger) accompagne et suit les deux solistes (notamment la flûtiste qui peut parfois presser un peu le pas). L’octuor instrumental déploie une agréable précision de jeu, composant une sonorité homogène, particulièrement dans certains unissons des deux violons.
Le public particulièrement enthousiaste réclame plusieurs bis. Sans oublier de tourner le dos à la nef, pour offrir une petite partie du concert aux spectateurs placés du côté du chœur de l’abbatiale, Bruno De Sá propose notamment “Verso già l'alma col sangue” (En perdant mon sang je rends l’âme) extrait d’Acis et Galatée de Haendel, moment suspendu très apprécié du public qui exprime généreusement sa joie par de longs applaudissements.