Requiem vivement opératique au Festival Verdi de Parme
L’interprétation du Requiem de Verdi est un moment rituel et un temps fort du Festival qui lui est consacré dans ce Théâtre royal de Parme : preuve de l’importance acquise par cette Messe sur les scènes lyriques, ce chef-d’œuvre surnommé “opéra en habits ecclésiastiques” entraîne encore et toujours un sentiment perceptible de recueillement et de célébration, sur scène comme en salle.
Les quatre solistes de cette édition 2023 offrent justement à ce Requiem les qualités qu’ils déploient habituellement au service des opéras. Le ténor Freddie De Tommaso rappelle ainsi dans le Kyrie le legato brillant qu’il offre par ailleurs à Tosca, manquant toutefois un peu de souffle pour déployer les longs et larges phrasés lyriques. L’Orchestre laisse toutefois peu de temps et de place aux solistes pour déployer leur identité vocale, seuls ou dans les ensembles, et le ténor profite ainsi des fins de phrases où les instruments décroissent pour prolonger ses phrasés pianissimo sur des voyelles lumineuses et limpides.
Daniela Barcellona (remplaçant Yulia Matochkina) apporte les qualités dramatiques d'une Ulrica dès qu’elle le peut, mais en souffrant plus que les autres de la battue implacable de l’orchestre. Le registre supérieur de la mezzo imprime néanmoins sa puissance, et ses notes imposent leur propre soutien.
La voix se marie d’emblée avec celle de la soprano Federica Lombardi, qui rappelle pour sa part Elvira : par une voix mélodieuse et crémeuse avec un registre supérieur cristallin (qui résonnerait encore davantage dans un plus grand espace acoustique).
Michele Pertusi impose les longs sanglots soigneusement placés du "Mors stupebit", plongeant vers un murmure vocalisé qui résonne dans tout le théâtre. Mais il ne parvient pas non à faire ralentir le tempo général, d'autant plus dommage que son Pagano l'avant-veille donnait envie de l'entendre déployer son phrasé sur le "Confutatis", avec toute sa gamme infusée de couleurs sur chaque ligne.

Les solistes réunis sonnent comme moins que la somme de leurs parties, le temps semblant avoir manqué pour s'accorder rythmiquement et avec l'orchestre. L'Orchestre de Bologne offre cependant la douceur de ses bois et l’impact de ses cuivres, sous la direction énergique d'Oksana Lyniv.
Les Chœurs réunis du Théâtre Royal de Parme et du Théâtre Communal de Bologne assument les dimensions de leurs parties et investissent l’espace sonore avec des articulations dynamiques précises et bien définies. Mais la colère divine (Dies Irae) impressionne encore davantage par son pianissimo, sombre, chuchoté.
La représentation est accueillie par le public de Parme avec l’enthousiasme et la passion d’un important rituel musical de nouveau accompli.
