Andromaque à Saint-Etienne : Hermione
« Dans l’Andromaque jouée à l’Opéra de Saint-Étienne en mars, j’ai l’honneur d'interpréter Hermione, fille de Ménélas, fiancée de Pyrrhus [qui aime et retient Andromaque captive] et aimée d’Oreste.
Cette tragédie-lyrique de Grétry datant de 1780 est proche des plus grands Gluck dans le style d’écriture et dans la forme. Les chœurs sont denses et d'une grande beauté, les récitatifs sont nombreux permettant de rentrer dans la compréhension des sentiments des personnages.
Dans ses Mémoires, Grétry écrit qu’il s’est servi d’Andromaque pour essayer d’établir une théorie nouvelle des principes de la composition musicale applicables aux sujets tragiques, s’arrêtant particulièrement sur les éléments harmoniques. C’est toute une théorie de l’accomplissement de l’œuvre lyrique, considérée dans son ensemble, mélangeant les procédés du poète avec ceux du musicien. Grétry écrit que l’auteur des paroles, Pitra, ne le quitte pas un seul instant lors de sa création. Toujours entraîné par la beauté et la rapidité de l'action, cet ouvrage fut fait d’un seul trait, en 30 jours, ne touchant aux vers de Racine qu’avec respect. Grétry utilise aussi des thèmes et instrumentation associés aux personnages et aux sentiments, procédé d’écriture attribué plus tard à Wagner et qui est déjà présente dans cette œuvre.
En découvrant l’Andromaque de Grétry, j'ai eu la sensation d'entendre le trait d'union entre Gluck et Berlioz. La grande tradition de la tragédie française avec classe, chaleur et élégance !
Hermione ouvre l'intrigue après un numéro de chœur. Efficacité de la prosodie, structure des phrases vocales incisives, Hermione est une femme de caractère, pas besoin d'avoir lu Racine pour le comprendre dès les premières mesures :
"C'est le seul espoir qui me reste ; ma rivale l'emporte et je n'en puis douter." Dès la première phrase, tout est dit : l'urgence d'une femme qui sent son amour lui échapper, l'impuissance face à un homme qui ne l'aime plus, la perte du pouvoir amoureux.
Grétry met en lumière une femme perdue qui prend des décisions et les regrette aussitôt ou presque. La fin sera tragique. Après avoir cru que son amant revenait, puis avoir été de nouveau abandonnée, elle obtient sa vengeance contre Pyrrhus grâce à l’amour d’Oreste. »
La suite et fin tragique d’Hermione est au programme du prochain épisode, le deuxième air choisi par Marion Lebègue pour présenter son personnage !
Cette nouvelle production de l'Opéra de Saint-Étienne, réalisée par ses ateliers et mise en scène par Matthieu Cruciani vous attend ces 8, 10 et 12 mars 2023.
Retrouvez les autres airs de notre série :
1- Le rôle-titre
2- Les larmes d'une mère
3- Pyrrhus
4- Pyrrhus et Andromaque
5- Hermione
6- La mort d’Hermione
7- Oreste
8- La fin d’Oreste
9- Le chœur
10- L’Orchestre