La Saint-Patrick joue les prolongations Salle Cortot
Cet ensemble créé en 2021 continue ainsi de faire la fête, deux jours après la Saint-Patrick, pour célébrer la sortie de leur premier album “O’er the Moor” : un hommage au répertoire tentaculaire par-delà les horizons mêmes du Nord de l'Irlande. Le répertoire parcourt ainsi une période temporelle allant du Moyen-Âge à nos jours, alternant les paysages Irlandais et Ecossais, avec une petite halte par la Bretagne (surprise non écrite sur le programme). Les arrangements musicaux de ce répertoire principalement issu de traditions orales sont réalisés par Robert Getchell et Chantal Santon Jeffery, les deux chanteurs de cet ensemble.
Chaque membre du Kraken Consort occupe une fonction particulière, ce qui permet de maintenir un équilibre sonore. Dès les premières notes, Chantal Santon Jeffery offre une performance lyrique dans son interprétation soulignée par une pédale instrumentale de tonique (tenue de la note fondamentale de la tonalité) accentuant encore la dimension voyageuse et aérienne de sa voix. Sa prestation dégage aussi un sentiment de légèreté dans le sens d’amusement (communicatif), s'appuyant aussi visiblement sur son habitude de la scène d'opéra. Son timbre clair est aussi lumineux que le sourire qu’elle partage généreusement avec le public.
Avec Robert Getchell, ils partagent certains titres notamment autour de la même thématique de l’amour rompu. Mais le ténor voyage lui aussi à travers toute la variété d'émotions de ce répertoire, parce qu'il sait voyager à travers sa propre tessiture. Les attaques dans les aigus sont réalisées avec souplesse et précision (y compris dans des nuances sonores faibles).
Le pupitre de vent est animé par Brewen Favrau et Sylvain Barou, tous deux à la cornemuse et à la flûte (uniquement à bec pour Brewen Favrau, contrairement à Sylvain Barou qui intervient pendant toute la première partie du concert à la flûte traversière en bois). Leur jeu virtuose en flux de doubles croches continus sont exécutés avec maîtrise.
Bruno Helstroffer au théorbe et Ronan Pellen au cistre proposent un jeu incarné qui se traduit notamment dans leur ample gestuelle sans rien ôter de la précision pincée du détail (mais aussi dans les expressions de leurs visages).
David Lombardi au violon n'hésite pas à se lever lors des envolées de son jeu. Les nuances explorées sont variées sans difficultés, avec une maîtrise jusqu'au bout de l'archet (et même en effleurant les cordes avec l'archet : mode de jeu dit flautando car rappelant alors le son aérien et clair d'une flûte).
Laurène Helstroffer Durantel tient également la rythmique centrale à la contrebasse là aussi avec une forme virtuose de détachement et de liberté faisant basculer l'instrument avec ses rythmes syncopés.
Le public incluant des proches des musiciens se montre très réceptif, dans une atmosphère chaleureuse et conviviale qui encourage les musiciens à offrir généreusement deux bis, avec même une pièce participative invitant à participer en imitant les instruments de l'ensemble vocalement : créant ainsi un dialogue vivant entre les musiciens et les spectateurs.