« Hôtel Moderne, bonsoir ! Nous avons l’eau chaude à tous les étages »

L’Hôtel Moderne ouvre ses portes dans le centre-ville de la Cité des Papes en cette période de forte affluence et de longues journées d’une chaleur étouffante. Heureusement, son équipe vaillante réunit quatre femmes passionnées (mais par la musique plutôt que par le service à la clientèle). L’histoire se déroule en 1955, cet hôtel est décoré dans un style vintage, très similaire à celui des vieilles sitcoms américaines comme « Jinny de mes rêves ». Il abrite une comédie musicale pétillante écrite et mise en scène par Yves Coudray, avec les lumières très colorées et ingénieuses d’Angélique Bourcet. Les compositions musicales mêlent du Gabaroche, Offenbach, Messager, Honegger, Hahn, parmi d’autres, incluses dans le scénario de manière intelligente.

Le Quatuor Ariane, créé en 2014, est composé d'une pianiste et de trois chanteuses (voire quatre), pleines d’énergie et d'humour. Le quatuor travaille d'ailleurs à un nouveau projet d’opéra clown avec la chanteuse et metteuse en scène Violaine Fournier (récemment citée sur notre site dans le compte-rendu de La Cuisine musicale, également à l'affiche du Festival d’Avignon Off).

Le programme du spectacle réunit ainsi des morceaux d’opérette en solo et des ensembles. Ces derniers sont exécutés de manière magistrale, mariant avec équilibre les différentes couleurs de voix : traduisant une habitude de travailler ensemble, tant sur le plan musical que sur la complicité évidente et l'aisance dans leur jeu.

La soprano Morgane Billet interprète Georgette, féministe invétérée admiratrice de Simone de Beauvoir et qui tente de sauver ses chères collègues des griffes des hommes. Elle donne vie à ce personnage d'une voix ronde et ardente, aux aigus puissants, facilement exécutés. Elle ajoute à cela une interprétation très distinguée, qui donne en même temps une certaine allure à son personnage, très drôle et attachant de surcroit.

La soprano Agathe Trébucq interprète Paulette, une fille très "libérée" qui aime séduire les hommes (un peu benêts tant qu'à faire, pour arriver à ses fins). Elle déploie sur scène sa voix généreuse, aux aigus ronds et bien soutenus (mesurés pour s’adapter à la petite salle). Elle captive ainsi elle aussi le public grâce à sa personnalité naïve et joyeuse.

La mezzo-soprano Flore Fruchart donne vie à Henriette, une jeune fille rêveuse et joviale. Elle fait chanter son personnage avec un timbre clair et iridescent, mais aussi d'une bonne puissance et via un joli vibrato très marqué. Elle propose une interprétation joueuse et pleine d’assurance.

La pianiste et cheffe de chant Éléonore Sandron incarne la dernière "-ette" de l’équipe, Ginette, une employée très à cheval sur le respect du règlement de l’établissement. Elle accompagne les chanteuses au piano avec souplesse et dynamisme, mais aussi avec une grande agilité et une belle musicalité pour chaque morceau. Elle surprend également le public lorsqu’elle se révèle soprano et rejoint ses collègues de scène dans le chant, faisant montre d’une voix chaude et veloutée, aux aigus bien soutenus, le tout sans perdre de vue le piano. 

Le Quatuor porte ainsi ce spectacle vivifiant et drôle, qui pose sur la table des sujets importants et toujours d'actualité, tout en le faisant d’une manière ludique et légère (et fort artistique). Le public enchanté manifeste son enthousiasme lors des saluts.