Une soirée chez Offenbach au Festival Off d'Avignon
Une crise -fort théâtrale- du compositeur Jacques Offenbach, vivant avec son employé-domestique et sa cuisinière-pianiste, est interrompue lorsqu’ils reçoivent une visite inattendue, mais très respectable (ou presque). La Princesse, en état d’ébriété, débarque et tente de charmer le domestique mais elle ne parviendra qu’une seule fois à bien prononcer ne serait-ce que le nom de son hôte. Ce spectacle musical, tout public, écrit et mis en scène par Martin Loizillon, se déroule ainsi dans le salon d'Offenbach, avec des décors assez légers mais qui donnent un air quelque peu opulent à la demeure du compositeur.
Cette saynète en un acte permet surtout de réentendre des airs d'Offenbach parmi les plus célèbres : passant de manière très fluide et ingénieuse des Contes d'Hoffmann à Orphée aux Enfers, de La Vie Parisienne à La Périchole, de La Belle Hélène à La Grande-Duchesse de Gérolstein, sans oublier le trio du Grill, extrait de Pomme d'Api.
Au bord de la crise de nerfs quoique ravi d’accueillir une princesse chez lui, le compositeur est incarné avec aisance par le baryton Nicolas Rigas. Très dynamique, son habitude de la scène est évidente. Il fait montre d’une voix ancrée et charnue, puissante et imposante (parfois contre ses collègues lors des ensembles).
Le ténor Guillaume Zhang interprète le domestique Justin (en alternance avec Pierre-Antoine Chaumien, qui chantonne à voix basse dans le public). Son enthousiasme est évident, restant souriant et investi dans son personnage tout le long du spectacle : naïf ou coquin, vaillant ou couard selon les exigences des différentes scènes. Il interprète Justin d’une voix claire et ronde, accompagnée d’un joli vibrato très présent et d’une belle tenue. Son texte est tout à fait compréhensible, sauf pour quelques petits passages. La fatigue, cependant, devient quelque peu marquée par moments, avec des phrases énoncées d’une voix faible, se laissant couvrir et se décalant. Néanmoins, il tient bon et parvient à offrir des aigus brillants et bien soutenus jusqu’au bout, méritant largement les applaudissements.
La Princesse un peu déjantée et folâtre est interprétée par la mezzo Christine Tocci (alternant avec la soprano Clémentine Decouture). Elle donne au personnage un air polisson, mais attachant grâce à une interprétation débordante d’énergie et d’astuce. Elle lui prête également sa voix claire et large, d’une texture soyeuse et aux aigus étincelants et soutenus. Elle remplace même la voix de basse dans le trio patriotique sans que cela ne gêne pour autant l’équilibre des voix.
La cuisinière-pianiste est interprétée par Marie-Christine Goueffon, qui soutient les trois chanteurs avec une grande dextérité et attention. Même si elle n’intervient pas énormément dans le jeu théâtral, elle ne reste pas à l’écart pour autant, et participe tout de même aux folies des interprètes depuis son piano.
Le public, enchanté par le spectacle, remercie les interprètes pendant de longues minutes. Et comme à la fin de chaque représentation de la Compagnie depuis 1919, les artistes entonnent la chanson du Théâtre du Petit Monde.
Dimanche dernier, au @MoisMoliere, notre nouvelle création : "Une Soirée chez Offenbach". Très bel accueil du public ! Bravo aux artistes : Nicolas Rigas, Christine Tocci, Pierre-Antoine Chaumien et Marie-Christine Goueffon. À partir du 7 Juillet au @festOffAvignon. pic.twitter.com/Oswfw6Wvxy
— Théâtre du Petit Monde (@ThePetitMonde) 20 juin 2023