Requiem de Verdi ovationné à BOZAR
L’opus est présenté devant une salle comble, tenue en attention jusqu’aux dernières notes, suivies par un silence absolu et une ovation générale debout : réaction polarisée à l’image d’une création mi opératique et mystique.
Comme l’explique éloquemment Arrigo Boito, compositeur italien et librettiste de Verdi : « Comme nous tous, il avait perdu la foi, mais plus que d’autres, il en avait gardé le regret », un secret fait d’éternité, traversant les siècles et résonnant avec ce projet même : le Collegium Vocale de Gand fondé par Philippe Herreweghe et devenu un ensemble fondateur de la refondation en musique baroque poursuit son avancée dans les explorations esthétiques temporelles avec ce sommet du romantisme. La patte baroque se ressent par la précision, même dans cet effectif où les chœurs entourent la formation instrumentale, avec un équilibre constant. La phalange vocale sculpte des aigus limpides, soutenus par des voix cernantes.
L’Orchestre Symphonique de Flandre déploie cette précision avec l’ample rondeur d’une sonorité à la fois profonde et modelée. Les tenues traduisent l’humilité religieuse, les harmonies affirment la sonorité architecturale.
La basse est tenue par Tareq Nazmi, dont la rondeur de voix, gorge ouverte, réussit à dessiner une prosodie très précise, sa ligne qui pourrait dominer restant ainsi en harmonie avec le reste du plateau.
Plus proche du répertoire opératique typique de Verdi, le ténor Ilker Arcayürek dessine vocalement une piété plus démonstrative. Déchiré de douleur, plus grave et romantique, sa voix est ornementée, serrée, moelleuse et vive.
La mezzo-soprano Sophie Harmsen s’impose par une richesse et une rondeur de voix qui apporte le caractère boisé et luxuriant de la distribution. D’autant qu’elle tient les exigeants graves avec expressivité.
Enfin, la voix de la soprano Eleanor Lyons s'impose avec élégance et retenue. Les aigus restent sensibles, s'éloignant de toute dimension démonstrative : la religiosité reste le maître-mot, ses fines lignes dorées perçant avec lumière parmi l’ensemble. Figurant la piété et la rédemption jusqu’à l’ultime Libera me, l'artiste semble habitée par son incarnation et charme visiblement le public.
Une fois encore, BOZAR rassemble ainsi ses fidèles-mélomanes autour d’opus incontournables du répertoire, se concluant par des acclamations.