Les charmes de Véronique à l’Odéon de Marseille
Les personnages nombreux évoluent au gré de l’intrigue durant les trois actes, dans les décors du Théâtre de l’Odéon impressionnant son public : le temple de Flore avec vue sur un monument qui évoque la Madeleine à l'Acte I, l'auberge du Tournebride avec banc et cordes fleuries de l'escarpolette à l'Acte II, le salon des tuileries à l'Acte III. Le tout est rehaussé par des costumes particulièrement typiques, travaillés et scintillants.
Charlotte Bonnet incarne le rôle-titre en se balançant sur une escarpolette fleurie, charmant immanquablement, dans le jardin du Tournebride, Florestan et le public avec les duos tant attendus (le duetto de l'âne "De-ci de-là, cahin-caha", et celui de l’escarpolette). Sa voix de soprano souple et agile, au timbre brillant, sait aussi montrer la rage du personnage avec des envolées virtuoses dans le registre aigu.
Frédéric Cornille présente un Florestan séducteur, possédant un timbre chaud avec un phrasé soigné, une ligne mélodique nuancée et des paroles intelligibles. Sa voix de baryton, bien projetée, à l’émission claire et au médium nuancé exprime son désarroi. Le duo entre Véronique et Florestan est rigoureux sur le plan rythmique, les paroles sont compréhensibles, mais les deux voix fort différentes ne s’épousent pas avec homogénéité.
Evariste Coquenard, fleuriste de son métier, se présente avec le timbre chaud de Franck Leguérinel et sa diction irréprochable, mais le grave est un peu voilé. Caroline Géa est une Agathe Coquenard coquine. Sa voix de soprano colorée, au médium solide et aux aigus timbrés, lui permet d’avouer sa liaison avec Florestan.
Monsieur Loustot surveille Florestan durant sa garde à vue. Cet étrange personnage, ancien noble, est interprété par Carl Ghazarossian, d’une voix de ténor brillante, bien articulée, avec un phrasé ample et souple.
Ermerance interprétée par Simone Burles, chante une romance mélancolique avant l’arrivée des invités et de la Cour, alternant des sons poitrinés et sonores, avec des médiums ronds dans une grande agilité expressive, particulièrement remarquée.
Séraphin, domestique d’Ermerance au caractère un peu “simplet” est incarné par Jean-Christophe Born et surtout chanté de son ténor à la voix claire, au timbre brillant et aux paroles intelligibles. Des rires en onomatopées sont échangés avec le chœur dans une grande précision rythmique. Davina Kint (issue du Chœur) chante avec justesse et précision le rôle de Denise la promise de Séraphin : ses vocalises fusent avec naturel et fluidité.
Dans cette mise en scène dynamique, le chœur est particulièrement sollicité pour des interventions vocales, rythmiques et dansées. Le Chœur Phocéen chante joyeusement, avec une justesse rigoureuse et une diction de qualité. L’Orchestre de l’Odéon, dirigé avec précision par Bruno Membrey, intervient avec efficacité dès l’ouverture. Il est d’abord joyeux, avec caisse claire, cordes soyeuses et des soli ponctuels du hautbois et de la clarinette. La deuxième partie de l’ouverture est plus charmeuse, avec ses rythmes à trois temps et des thèmes plus mélancoliques.
Les solistes et le chœur chantent plusieurs fois l’ultime refrain du finale, sollicités et félicités par le public de l’Odéon, enthousiaste et totalement enchanté !