Intimité et douceur du Requiem de Fauré par le Chœur de l’Opéra de Paris
Le public se montre ravi de se rendre en cet après-midi au Palais Garnier et de pouvoir entendre le Chœur de l’Opéra national de Paris, mis à l’honneur par ce programme aux couleurs romantiques, nostalgiques avec une pointe de fantastique. Les premières œuvres, les Vier Gesänge de Johannes Brahms (1833-1897), ne font appel qu’au chœur de femmes, accompagné par l’intéressante complémentarité d’une harpe et de deux cors, dont les musiciens sont issus de l’Orchestre de l’Opéra national de Paris. Sous la direction caressante et sans extravagances de leur Directeur musical José Luis Basso, la quinzaine de chanteuses fait preuve d’un clair travail d’ensemble, malgré les distances imposées entre chacune d’elles. Les couleurs proposées font apprécier le soin porté à la diction qui offre une bonne compréhension du texte et des intentions. L’acoustique de la salle est sans doute exigeante, ne favorisant ni l'homogénéité (certaines voix s’échappant davantage que d’autres), ni l’équilibre (le pupitre des alti étant plus présent que celui des sopranes).
Quelques hommes rejoignent ensuite leurs collègues féminines sur ce proscenium (où se déroulent les concerts durant les travaux) pour interpréter les Liebeslieder Walzer du même compositeur. Si les femmes ont pu trouver leur équilibre grâce aux œuvres précédentes, les hommes doivent à leur tour prendre un peu de temps pour le chercher. Les ténors, notamment, sont un peu loin et le piano à quatre mains parait, dans un premier temps, bien plus présent. Mais rapidement, les couleurs se présentent à l’oreille de l’auditeur, facilement transporté par le rythme valsé de ces douces chansons d’amour : entre autres passages, la nuance piano des hommes dans « Sieh, wie ist die Welle klar » (Regardez comme la vague est claire). Toujours accompagnés du touché précis et affirmé des pianistes Alessandro Di Stefano et Corinne Durous, deux membres du chœur sont chargés de solos. L’alto Marianne Chandelier est très convaincante lors de son « Wohl schön bewandt war es » (Il était bien connu) grâce à une diction soignée, une présence naturelle et une projection permettant de transmettre de justes intentions. La voix du ténor Luca Sannai sonne encore un peu verte avec des phrasés manquant légèrement de fluidité, mais lentement sa présence scénique prend un peu d’assurance pour montrer de touchantes intentions.
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— Helene M.A. (@helene_mahln) 25 octobre 2020
Plusieurs transcriptions du Requiem de Gabriel Fauré (1845-1924) existent. C’est celle avec orgue seul qui est interprétée aujourd’hui, bien que l’Opéra de Paris ne possède pas de véritable orgue. Malgré les efforts attentifs de l’organiste Denis Comtet, son instrument fait entendre des sons échantillonnés sans personnalités et une pédale expressive brusque ne permettant pas de subtiles nuances. Cela n’empêche en rien le chœur d'en présenter de très belles, surtout dans les passages pianissimo, toujours présents, sublimement contrôlés. Ces passages sont d’autant plus captivants lors des moments a capella de L’offertoire. Les phrasés se font également célestes, voire irréels, dans le Sanctus, ou intenses dans l’Agnus Dei. Remplaçant au dernier moment deux de leurs collègues, l’œuvre est l’opportunité d’entendre deux autres membres du chœur. Le baryton Christian-Rodrigue Moungoungou montre un médium moelleux, des graves impérieux, un vibrato souple et de longs phrasés soutenus avec attention. La tout autant attentive soprano So-Hee Lee enchante lors du « Pie Jesu » d’une voix claire et précise, offrant une interprétation belle et douce, sans être religieuse, bien soutenue par un vibrato légèrement serré.
José Luis Basso parvient à garder, le plus longtemps possible, le beau silence qui termine le reposant et réconfortant « In Paradisium », avant que les auditeurs ne le brisent pour saluer chaleureusement tous les artistes.
