Les Arts Florissants de Marc-Antoine Charpentier dans la Cour de Marbre au Château de Versailles
La Cour de Marbre accueille ce Divertissement royal, sous un ciel clair, avec un doux vent soufflant entre les orangers : les lieux suffisent à la scénographie pour annoncer l'entrée des personnages et de la musique, par un geste théâtral du chef Gaétan Jarry. Signée Damien J. Jarry (frère de Gaétan), la mise en scène se concentre sur l'essentiel, avec un contraste entre l’archétype baroque (ses costumes, sa dramatisation) face à une gestuelle et des accessoires plus modernes. Les danseurs, préparés par Hubert Hazebroucq, assurent des chorégraphies baroques charmantes, élégantes et raffinées, rappelant pleinement l'esprit "Roi Soleil".

L’Ensemble Marguerite Louise exprime l’esprit de la musique baroque française et plus précisément de Charpentier par un jeu dynamique, une souplesse dans l'interprétation et une intimité capable d’affirmer les émotions de la partition. Le chœur est composé d’une douzaine de solistes qui interagissent activement au fil des événements par des timbres ronds, corsés, très accordés et justes.
Les solistes montrent leurs qualités de technique vocale mais également leurs compétences de dramatisation. Maïlys de Villoutreys est une soprano éclatante qui donne corps aux personnages de la Musique et de Roselie. La voix est très expressive même si l'ambitus parcouru n'est pas si ample. Sa collègue Virginie Thomas montre en Poésie et Flore un bon contrôle du souffle pendant ses phrases musicales. Sa voix suave et sonore joue des ornementations ainsi que du legato. La mezzo Anaïs Bertrand aux registres éclectiques joue l’Architecture et Hyacinthe avec présence scénique, d’un timbre net et clair.

Cécile Achille met son soprano ductile au service de la Paix et d'Amaranthe. Limpide et bien appuyé, son tempérament élégant est aristocratique, notamment au regard de la sombre et obscure Discorde, interprétée par la basse David Witczak (vibrant, fort et très lié). La Peinture et le personnage de Forestan sont chantés par le ténor Jonathan Spicher, caractérisé par ses résonances haute-contre (le ténor aigu typiquement à la française) mais aussi la souplesse vocale. Enfin, Cyril Costanzo est un guerrier et Pan. Précis, le grave est en outre très sonore et vibrant ce qui lui permet de soutenir l'harmonie, comme il fait le lien entre les différents personnages grâce à sa présence scénique.
Gaétan Jarry dirige cette machinerie théâtrale et musicale avec toute son énergie et son charisme, sans négliger les moments d’intense émotion. Son corps dansant, sa direction ferme et vive se rehaussent souvent d'un grand sourire, communicatif pour le public et à l'image de ces arts refleurissant dans la demeure du roi de France.
