Emöke Baráth et Il Pomo d'Oro flamboient sur la scène de l’Arsenal de Metz
Le lendemain de la parution de leur disque, Voglio cantar, Emöke Baráth et Il Pomo d’Oro portent sur scène cet hommage à Barbara Strozzi. Élève de Francesco Cavalli, la compositrice eut suffisamment de talent et de courage pour s’imposer dans l’univers musical masculin de Venise avant de tomber dans l’oubli. Ramener au premier plan cette talentueuse artiste (chanteuse, écrivaine de livret et compositrice bien que fille de servante), rappeler que son génie rivalise avec Antonio Cesti, Francesco Cavalli, et la période italienne de Haendel : tels étaient les défis entrepris par la soprano hongroise et l’ensemble instrumental baroque (fondé en 2012).
Emöke Baráth, portée par le soutien d’un ensemble précis, rend l’émotion et la technicité de Barbara Strozzi, dès le souffle des premiers accords à l’articulation nette et ciselée de l’italien, si précise et incarnée que le texte (la parole comme le sens) est compréhensible sans le support du livret. La solide tenue vocale supporte des voyelles plus aiguës et une cascade de "r" roulés dans une impression d’aisance pour les compositeurs masculins, mais elle ajoute sur les airs de Strozzi une lumière quasi orientaliste. Le son s'étire dans un adoucissement des résonances, un resserrement des harmoniques, avant de descendre en souplesse vers les graves. Déterminée, puis piquante et justement rieuse sur "Mi fa rider la speranza", son incarnation des personnages sert le chant et lui donne l’occasion d’une « vendetta » rageuse et bouillonnante chez Haendel, d’une « vittoria » glorieuse pour Cavalli, avant deux rappels (dont La Calisto du même Cavalli) au timbre encore à la fois épuré et enrichi.
L’ensemble Il Pomo d’Oro et la direction de Francesco Corti, également claveciniste, rehaussent l’expressivité d’Emöke Baráth en ciselant la dentelle des luth et théorbe, poussant les graves du violoncelle, de la contrebasse et de la viole en contraste avec les aigus de la soprano.
L’ovation du public est renforcée lorsqu'Emöke Baráth présente les rappels : quoi qu’elle en dise, c'est dans un très bon français qu'elle exprime sa joie d’être à Metz où elle n'était pas revenue depuis ses « sept ans », dans une salle « grandiose », dont l’acoustique participe elle aussi pleinement à la qualité de ce concert.
Cette deuxième étape du temps fort ‘Viva L'Italia !’ après Les quatre Saisons de Vivadi dans le concert symphonique en ouverture, se poursuit par Bestemmia d'Amore (Juron d'Amour) de Pippo Delbono et Enzo Avitabile, Lo Guarracino de l’Ensemble Neapolis, avant un nouvel épisode "Contraltos" de Nathalie Stutzmann et son Orfeo 55.
Réservez vos places pour admirer Emöke Baráth, Eva Zaïcik, Lea Desandre ou encore Emiliano Gonzalez-Toro dans Orphée de Claudio Monteverdi au Théâtre des Champs-Élysées