L’art du contrepoint à la Cathédrale de Metz
La saison musicale de la Maîtrise de la Cathédrale s’achève avec un programme intitulé « Comme un goût d’éternité », avec une œuvre de jeunesse de Jean-Sébastien Bach et la découverte d’œuvres de ses prédécesseurs.
L’ensemble Dulcis Melodia, composé de violons, violes de gambe, violone, clavecin, orgue et flûtes à bec a choisi le programme de ce concert. La cantate Gottes Zeit ist die allerbeste Zeit, (Le temps de Dieu, c’est le temps propice) œuvre de jeunesse de Bach, est l’occasion d’entendre une instrumentation particulière par l’ajout de la flûte à bec au continuo, instrumentation qui s’effacera par la suite dans l’œuvre du compositeur. Les musiciens ont souhaité reconstituer un paysage sonore bien particulier en préambule, celui que le jeune Bach a pu entendre, à travers des œuvres de Franz Tunder (1614-1667) et Dietrich Buxtehude (1637-1707), toutes les cantates du concert ayant l’éternité pour thème commun.
Sur la cantate Dominus, illuminatio mea (l’Éternel est ma lumière) de Tunder le contrepoint des chanteurs de la Maîtrise de la Cathédrale a une résonnance ferme. La diction assurée est conservée par tous dans les tempi accélérés, et est aussi maîtrisée sur Der Herr ist mit mir (Le Seigneur est avec moi) de Buxtehude. Sur l’autre cantate de ce dernier au programme, Jesu, meines Lebens Leben, (Jésus, vie de ma vie) les voix masculines efficaces se greffent à celles des soprani et alti claires et chaleureuses pour un autre modèle de contrepoint.
Les flûtes à bec dirigent la sonatine introductive de Gottes Zeit ist die allerbeste Zeit et le premier tutti permet aux voix féminines de faire résonner des aigus plus marqués sur le vers final. Le timbre du ténor, pour sa partie soliste, est d’emblée chaleureux, mais un peu en difficulté sur le dernier vers, plus difficile à exécuter, les –en finaux des verbes allemands un peu trop sonores, là où ils devraient être réduits.
Le solo de la voix de basse offre un timbre puissant, une diction claire, un vibrato efficace, avant un contrepoint exécuté de voix de maîtres par le chœur, où résonnent des aigus cristallins. La belle résonnance de l’alto pour le solo suivant se déploie grâce à une construction efficace, graves profonds, comme pris du fond de la gorge. Le rythme accéléré soudainement sur les derniers vers ne met pas le chœur en difficulté, l’articulation étant toujours claire, sans perdre en projection.
À la direction, le chef Christophe Bergossi rappelle que l’acoustique, de par la dimension de la cathédrale, rend l’exécution des morceaux plus complexe que dans une petite église baroque. L’effet global est d’autant plus prégnant, car l’écho créé par la nef assure aux textes de chaque cantate une portée démultipliée. Le public peut, à la sortie, admirer les jeux de lumières et les ombres portées sur la cathédrale à l’occasion du festival Constellations, écho visuel de la beauté de l’acoustique.