Article utilisateur
La musique de Oaxaca
Envoyé Spécial (France 2) a diffusé en mai (et rediffusé le 20 septembre) un reportage sur cette extraordinaire aventure humaine et musicale.
Un bidonville, dont la sécurité aléatoire n’est assurée que par les rondes de nuit des habitants, machette au poing, possède la plus grande décharge publique des environs, dans laquelle des enfants sont chargés de trier les ordures, douze heures par jour, pour l’équivalent de dix euros. D’autres, près du terrain de sport construit à proximité, découvrent l’addiction à la colle. D’autres encore, de plus en plus nombreux, découvrent la musique à l’école d’initiation musicale Santa Cecilia.
Fruit de la formidable initiative « La banda de Música » d’Isabelle de Boves, pilote de ligne d’Air France, l’école s’est progressivement dotée d’instruments, grâce à un pont aérien astucieusement construit entre la France et le Mexique. Plusieurs vols ont embarqué des passagers de cuivre et de bois, généreusement offerts en France, restaurés dans l’un des deux ateliers du bidonville, et remis aux enfants.
Le contexte socio-culturel mexicain est au centre du reportage, qui rappelle que la musique ne résout pas tout mais qu’elle peut être un levier social, même si les enfants de l’école ne sont pas encore promis à des carrières internationales. Religion oblige, le curé local bénit les nouveaux instruments avant qu’ils ne soient remis à leurs jeunes propriétaires.
Ceux-ci sont profondément attachés à leurs instruments, auxquels ils apportent un soin attentif. L’un d’entre eux, parti vivre chez sa mère après que son père ait cassé son violon, (une perte de temps selon ce dernier), s’est vu remettre un violoncelle, dont il maîtrise déjà parfaitement le vibrato. Un autre, contraint d'abandonner la batterie pour vivre de petits boulots, a transmis l’amour de la musique à ses sœurs, élèves de l’école.
Le chef d’orchestre local, ancien clarinettiste professionnel, dirige des musiciens dont le travail acharné est récompensé par la perspective d’un concert à Mexico, qui, faut-il le rappeler, concentre la majorité des bénéfices économiques du pays.
Le contraste est saisissant pour les jeunes musiciens et le spectateur, lorsque l’orchestre symphonique débarque dans l’une des plus belles salles de concert de la ville. Ce n’est pas encore le Palacio de Bellas Artes, mais ce sont déjà 300 places qui ont été vendues, à 50€ l’unité, pour un public aussi éloigné géographiquement que socialement des enfants de Oaxaca.
Grâce à leur chef et à un flûtiste professionnel grec, grâce à des heures de travail acharné de théorie et de pratique, le jeune orchestre proposera Fauré et Beethoven pour un court concert d’une demie heure. En coulisse avant la représentation, ils craqueront sous le coup de l’émotion. Mais ils donneront tout sur scène, comme ils se l’étaient promis, alliant un ancrage technique solide et une lecture touchante des œuvres, dans les courts extraits du reportage, à voir et à revoir.