350 amateurs et professionnels à l’unisson à la Philharmonie de Paris
Le programme de ce soir a pour mot d’ordre l’éclectisme, avec toutefois une relative dominance de la musique religieuse (quatre pièces sur un total de huit). Les langues liturgiques (latin et slavon orthodoxe) y côtoient l’allemand et le bété, le baroque (Charpentier) et Mozart partagent l’affiche avec le romantisme (Brahms, Tchaïkovski), une œuvre moderniste d’Aaron Copland et une composition de zézé pop (style de pop ivoirienne) de John Yalley.
Avant tout, les œuvres choisies se prêtent à l’interprétation dynamique que leur insuffle François-Xavier Roth et les multiples musiciens réunis, offrant l’occasion de se déployer pleinement les ensembles considérables : 210 choristes (dont 170 de la Société Générale et 40 professionnels des Métaboles), 80 instrumentistes Société Générale entourés par 60 musiciens de l’Orchestre Les Siècles, pour un total de 350 musiciens sur scène ! L’euphorie de tous les artistes est palpable, aussi bien du côté des amateurs ravis d’être présents sur cette grande scène que de celui des musiciens professionnels qui leur ont transmis leur passion et leur savoir tout au long des mois de répétitions (répétitions qui ont d’abord eu lieu en formations plus restreintes réparties en France, en Côte d’Ivoire, au Luxembourg et en Suisse, avant de se faire au complet en amont des représentations). Il règne donc un enthousiasme communicatif dès l’énergique Te Deum de Charpentier qui ouvre le spectacle, et jusqu’à la Marche triomphale d’Aïda en clôture, portée par les cuivres répartis de part et d’autre de la salle pour ce bouquet final.
Faire jouer un répertoire aussi varié par un orchestre aussi grand, associant musiciens professionnels et amateurs répétant sur leur temps libre représente un défi considérable, comme le bonheur qu’il semble dégager. Si la précision des grands ensembles n’est pas toujours chirurgicale, les musiciens savent se mettre au diapason et porter chaque œuvre interprétée avec rigueur et conviction. Les chœurs résonnent avec force et passion, pouvant aussi se faire plus contemplatifs, comme lors de l’a cappella du Bogoroditsè devo de Rachmaninov, tandis que l’orchestre se montre vivace et souple.
Le bis est une reprise d’une des œuvres au programme, You o onon, chanson en langue bété de l’Ivoirien John Yalley. Elle est interprétée par le soliste Ba Banga Nyeck au balafon, instrument percussif de l’Afrique de l’Ouest, constitué d’un clavier ressemblant à celui d’un xylophone qui est placé au dessus de calebasses, donnant des vibrations flûtées. Le soliste est rejoint par le chœur, qui inclut même les membres de l’orchestre ayant laissé pour l’occasion leurs instruments de côté. Pour ce morceau, Boffouo Pierre Kouamé, le chef des chœurs de la formation d’Abidjan, accompagne François-Xavier Roth. Si ce dernier avait lors du concert déconseillé (gentiment) à quelques enthousiastes de se joindre aux claquements de main rythmant le morceau, pour le bis, non content d’encourager le public, il porte sa direction de part et d’autre du quatrième mur, indiquant le tempo et la force des claquements de main souhaités. Le public se prête au jeu avec entrain, point d’orgue idéal à ce qui aura été une rencontre joyeuse entre les musiciens de profession et les musiciens de circonstance, tous en cœur.