Salon Mozart avec Les Surprises à la Philharmonie de Paris
L’ensemble musical Les Surprises prouve que Mozart, figure de proue du classicisme viennois réputé pour ses opéras, ses symphonies ou encore ses sonates, sait encore surprendre. C’est d’ailleurs avec un grand enthousiasme de la part du public que cette performance artistique est reçue.
La programmation particulièrement éclectique aux allures baroque démontre toute la virtuosité et le génie du musicien, capable de s’adapter à toutes sortes d’exercices de composition.
Dans une ambiance intimiste à l’image des salons d’époque, Les Surprises proposent en effet un répertoire Mozartien plus rare et résonnant avec la musique baroque qu’il jouait également en tant qu’interprète. L’occasion est ainsi donnée de faire vibrer des instruments de ce musée de la Cité de la Musique, en jouant sur instruments d’époque -un piano forte à queue 1791 de Gräbner et un clavecin Hemsch de 1761- déployant la vaste palette sonore des factures instrumentales datant de la même période que le virtuose compositeur.
Le prélude du concert, formé par les Sonates d’Église de Mozart, permet de poser le terrain esthétique avant les cinq pièces vocales à suivre. Violon, violoncelle, contrebasse et orgue (tenu par le chef Louis-Noël Bestion de Camboulas) installent l’étoffe de leurs textures harmoniques par des pièces succinctes, allegro et en mode majeur (sans caractère ecclésiastique, mais plutôt empreintes d’une certaine légèreté sous le clavier et les archets de l’ensemble). La soirée propose également la redécouverte d’œuvres originales, qu’il s’agisse de pièces écrites pour harmonica de verre ou encore destinées à un orgue mécanique. La Fantaisie en fa mineur prend, par exemple, une dimension joviale mais passionnée sous le toucher et les nuances de Louis-Noël Bestion de Camboulas. L’organiste sait en effet s’adapter aux nombreuses modulations que l’œuvre -destinée à la machine- impose au musicien.
La partie vocale permet à la soprano Marie Perbost de déployer l’étendue de son timbre brillant, avec le large ambitus et le contrôle technique requis. Ses amples vocalises sont empreintes d’une sureté déconcertante. La pureté de sa voix sait s’adapter sans encombre aux nombreux mélismes, trilles et lignes liées qui sont exécutées avec brio. Mais c’est essentiellement dans les aigus que la clarté de sa tessiture vocale atteint son paroxysme.
Tantôt baryton, tantôt ténor mais toujours d'une ligne vocale claire et puissante, c’est davantage dans cette seconde tessiture que Marc Mauillon offre une diction particulièrement fluide et dégagée de l’allemand. Sa voix pleine, ample et si singulière agrémente à merveille les pièces vocales au rythme ternaire, typique de la Serenata baroque.
L’ensemble Les Surprises met ainsi en exergue tout ce que le répertoire Mozartien doit au baroque, le programme mettant ainsi en lumière des procédés typiques du mouvement qui se sont transmis au classicisme, dans la technique d’accompagnement comme l’utilisation de la basse continue ou bien dans ses multiples formes (motets et fugues, en versions chantées ou uniquement instrumentales).
Le concert garde cette dimension à la fois originale et originelle, jusqu’à sa pièce finale : La Marche funèbre del Sigr. Maestro Contrapunto. Une appellation traduite par « maître du contrepoint » en français. L’ironie de Mozart reste donc saisissante jusqu’au bout avec cette satire de l'écriture contrapuntique typique de la période baroque : de quoi à la fois montrer et moquer la filiation...