La Cabane aux Citrouilles au Festival de Saintes
Cette Cabane aux citrouilles est celle du jardin-potager d’Heinrich Albert avec sa tonnelle soutenant les cucurbitacées sur l’île de Lomse à Königsberg, l'actuelle Kaliningrad (enclave russe dans l'Union Européenne, source de regains de tensions). Pourtant et même à l'inverse, à l'époque de la Guerre de Trente ans, ce lieu et son emblématique Cabane aux citrouilles était un refuge, un havre pour les artistes.
La soprano Dorothee Mields (de parents allemands et ukrainiens) et le Hathor Consort dirigé à la viole de gambe par Romina Lischka rendent hommage à ce sanctuaire artistique et y replongent le public en interprétant une sélection d'œuvres qui furent composées dans ce laboratoire du chant baroque allemand. Le programme se divise en cinq parties (Guerre, Paix aspirée, fragile Trêve, Attente et une Conclusion ouverte) avec 14 morceaux, de sept compositeurs, le maître des lieux Heinrich Albert étant distingué par six pièces.
La thématique et l'esprit du concert insufflent pleinement l'esprit de son exécution (et réciproquement), la soprano allemande Dorothee Mields en montrant toute sa connaissance (notamment dans l'articulation et le phrasé), sa générosité et tendresse vocale. Sa tessiture est centrale, avec un timbre rond, riche et sonore. La ligne de chant est longue et agile, comme les sentiments amoureux et joyeux qu'elle réunit.
Le Hathor Consort offre un accompagnement riche et unique par l'union de neuf timbres d'époque installés en forme de U autour de la chanteuse. Réglé comme une horloge suisse, huilé et chauffé, l'ensemble instrumental est finement calibré en rythme et en justesse, sachant très rapidement reprendre les quelques petits écarts de tempéraments en domptant leurs instruments capricieux.

L'Abbaye aux Dames est comble et comblée d'un public applaudissant, ravi, ce moment délicieux comme un velouté de citrouille (et encore plus inhabituel).
