Gala lyrique à Vichy pour lancer la tournée 2022 des Voix solidaires
Cette nouvelle tournée des Voix solidaires, dont l’édition 2021 avait permis de récolter plus de 30.000 euros au profit de la lutte contre les violences faites aux femmes, regroupe cette année près de 250 artistes (chanteurs, instrumentistes, metteurs en scène...), qui tous interviennent régulièrement lors de concerts dont les fonds sont intégralement reversés à des œuvres caritatives.
Aussi, pour cette première date de l’édition 2022, pas moins d’une trentaine d’artistes lyriques répondent déjà présents, avec une marraine de choix en la personne de Béatrice Uria-Monzon. Au programme, un festival de grands airs du répertoire lyrique, allant de Mozart (“Soave sia il vento”, Cosi fan tutte) à Puccini (“Dunque è proprio finita", La Bohème) et Verdi (“Bella figlia dell’amore”, Rigoletto) en passant par Rossini (“O che muso”, L'Italienne à Alger), Donizetti (sextuor “Chi mi frena”, Lucia di Lammermoor) voire même Carl Orff (“O Fortuna”, Carmina Burana). Un programme rythmé aussi par des incursions dans le registre plus léger et moderne de la comédie musicale (“America” et “I Feel pretty”, West Side Story).

De ce concert aux nombreuses réjouissances, l’un des moments les plus marquants est assurément ce duo unissant Béatrice Uria-Monzon et Delphine Haidan, dans la Barcarolle des Contes d’Hoffmann réunissant ici deux voix d’une même rondeur et d’une égale volupté dans l’émission. La marraine de cette soirée offre aussi un poignant “Pace, pace mio Dio” porté par la force de son incarnation dramatique, regard tourmenté et mains projetées vers l’avant, avec une voix d’une saisissante puissance expressive culminant en un déchirant “Maledizione!”. Delphine Haidan, dans son registre plus grave de mezzo, use avec raffinement de l’ardeur de son timbre en Olga, aux côtés de Tatiana campée par Deborah Salazar (voix sonore et joliment vibrée). Cette dernière est aussi remarquée en Mimi aux côtés du ténor Jérémy Duffau, qui chante Rodolfo avec une voix ample, sonore et au timbre élégant (avec un aigu pour le moins vaillant). Son Nemorino trouve en Charlotte Bonnet une Adina au timbre sonore et chatoyant, avec un jeu scénique fort investi.

D’autres voix se font aussi entendre. Telle celle râblée et fort distinguée d’Éléonore Pancrazi, vocalisant avec gourmandise dans L'Italienne à Alger, aux côtés de Jean-François Vinciguerra avec qui elle partage une évidente complicité scénique. Ce dernier, rossinien doté d’une large et puissante voix de baryton-basse, est un truculent Mustafa qui joue de ses talents de comédien pour être tout aussi à son aise dans cette savoureuse Recette du tournedos Rossini (orchestrée par le compositeur Jean Malraye sur le thème de l’ouverture du Barbier de Séville) qui donne l’occasion à Laeticia Goepfert de faire entendre un mezzo chaud et aisément projeté. Clara Guillon est de son côté une Musetta au medium charnu et à la voix suave et vibrée, quand Lina Ferencz porte Dorabella avec la conviction d'une ligne de chant appliquée et portée par un souffle certain. Clara Fournillier est une élégante et mélodieuse Fiordiligi, et Frédérique Varda une Violetta enjouée au soprano vif et richement timbré. Le chant sonore et expressif d’Emmanuelle Guillier s’épanouit dans le comique quatuor de l’omelette issu de l’opérette Le Docteur Miracle, avec le guilleret soprano de Clémentine Decouture. Clara Bellon, par son instrument de soprano plein d’une fraîche spontanéité, et Jeanne-Marie Lévy, au mezzo bien plus mature, s’illustrent elles aussi, tout comme Ève Coquart qui, en plus d’avoir pris activement part à l’organisation du concert, campe dans le fameux sextuor des Noces de Figaro une Susanna rayonnante au soprano aussi vif que le rouge de sa robe.
Dans un casting numériquement dominé par les dames, ces messieurs ne sont pas en reste, avec notamment Jean-Fernand Setti qui, en Don Alfonso notamment, expose une voix de baryton sonore émise avec aisance. La noblesse de timbre vaut aussi pour la basse de Guillaume Dussau, ténébreuse à souhait, ou pour la voix du tout aussi charismatique Kristian Paul, Rigoletto au baryton imposant et bien creusé. De sa tessiture plus aiguë et légère, Hugo Tranchant donne à entendre avec entrain une incisive voix de ténor, tout comme Ismaël Billy en fougueux Alfredo. Chez ces mêmes ténors, Teddy Métriau affiche une voix à l’assurance et à la projection fort appréciables eu égard notamment à son jeune âge. Quant à Mikhaël Piccone, co-fondateur du Calms, il profite de ce gala dont il assure l’animation pour faire le meilleur des usages d’une voix de baryton clair dont le timbre distingué vient notamment servir le rôle de Marcello.

La soirée offre aussi des ensembles, comme le Galop Infernal où la coordination entre les artistes est d’autant plus appréciable que ceux-ci, bien que se connaissant déjà pour la plupart, n’ont eu que quelques jours pour travailler ensemble. Devant aussi beaucoup aux harmonieux accompagnements des pianistes Marion Liotard, Mickael Bardin et Olivier Dauriat, la soirée se conclut par la remise d’un chèque de 6.355 euros à quatre associations luttant contre l’isolement et la discrimination dans le département de l’Allier. Le Calms poursuivra sa tournée des Voix solidaires en juin, à Marseille, Avignon, Massy et Nice.
