Intimité et amours mélancoliques de Josquin Desprez par Dulces Exuviae à Vézelay
Ce 27 août 2021, les férus de musique Renaissance commémoreront le 500e anniversaire de la disparition de Josquin Desprez, compositeur majeur de cette époque. Après le concert de l’ensemble Clément Janequin, les Rencontres Musicales de Vézelay proposent de revivre la musique du grand maître dans une configuration très différente : en ce dimanche matin, dans la petite église Saint-Jacques-le-Majeur d’Asquins, au pied de la colline de Vézelay, le duo Dulces Exuviae plonge le public dans l’intimisme d’un salon de courtisans du XVIe siècle, bercé au son des chansons mariales ou de désolation amoureuse.
Assis aux côtés du luthiste slovène Bor Zuljan et tenant à la main, non pas des partitions, mais une sorte de bréviaire finement décoré, le jeune baryton Romain Bockler charme par sa voix au timbre chaleureux et sa présence élégante. Il prend un plaisir certain à chanter ces mélodies et à les orner de souples vocalises. Déclamant avec éloquence certains textes en moyen-français avant de les chanter, il fait preuves d’intentions mélancoliques qui portent la poésie de la musique, peut-être même avant celle du texte. L'auditeur retiendra entre autres le très touchant da capo (reprise au début), très doux, du Quant de vous seul de Johannes Ockeghem, maître qui influença grandement l’œuvre de Desprez. L’auditeur ayant pu assister au concert de la veille avec l’Ensemble Clément Janequin peut être enchanté d’entendre une version différente de la tendre et mélancolique Douleur me bat ou la célèbre Mille regretz. Le chanteur fait également entendre des vocalises avec une maîtrise de très bon goût, « chantées de belle manière » dirait-on à l'époque de Josquin Desprez, particulièrement pour l’Ave Maria qui clôt le programme, juste avant que les cloches de l’église ne sonnent l’angélus pour annoncer gaiment la prière de midi.
Le luthiste Bor Zuljan partage quelques pauses instrumentales, accompagnant les présentations déclamées de son ami, offrant une courte improvisation sur de gracieuses ricercare (recherches musicales) ou proposant des œuvres comme un commentaire ou une résonnance des chants précédents, telle la version de Mille regretz arrangée par le luthiste Luys de Narváez qui la fit connaître à Charles Quint. Devenant ainsi la chanson préférée de l’Empereur, cet arrangement porte d’ailleurs depuis le titre de Canción del Emperador.

Si la mélancolie rythme ces chansons, le public n’en est pas moins charmé. Il a ainsi droit en bis au Lamento qui fut si célèbre en Europe, Josquin Desprez pleurant avec tout son art la disparition de celui qu’il admirait tant, Ockeghem. Un hommage ici et désormais dédié à Desprez.