Le Singe d’une nuit d’été & Pomme d’Api en légèreté à l’Odéon de Marseille
Cette première représentation du diptyque Le Singe d’une nuit d’été / Pomme d’Api mis en scène par Yves Coudray initie le dispositif « Opéras au Sud » porté par la Région Sud et qui articule les opéras d’Avignon, de Marseille, Nice et Toulon. La mutualisation des moyens et des ressources des structures étant de mise, il s’agit à la fois d’optimiser les coûts de production et de permettre une plus large diffusion des ouvrages. Dans la même veine que les Bouffes de Bru Zane, ce sont deux opérettes en un acte qui sont mobilisées : Le Singe d’une nuit d’été (1886) de Gaston Serpette, créé au Théâtre des Bouffes-Parisiens, et Pomme d’Api d’Offenbach (donnée à entendre en version de concert l’été dernier au Festival Radio France Occitanie Montpellier et qui sera également représentée à Cannes : réservations).

Les deux ouvrages présentent deux facettes du conflit amoureux, le premier dans le monde du cirque, le second dans celui d’une certaine bourgeoisie mondaine. Le Singe d’une nuit d’été narre l’histoire d’Atala, délaissée par son mari, qui trouve par mégarde un singe dans sa loge, lequel se trouve être son mari, ainsi déguisé pour s’assurer incognito de la fidélité de sa femme. Dans Pomme d’Api, Rabastens, oncle de Gustave l’ayant obligé à se séparer de Pomme d’Api, s’entiche d'une bonne qui se trouve être cette dernière. Afin de tuiler les deux ouvrages (et en réponse au principe d’une production transportable facilement), Yves Coudray présente un décor à transformations. Dans un mouvement de transition, les deux opus s’enchaînent sans pause, et par de fins retournements, la loge du cirque devient un riche salon.
Le plateau vocal est accompagné depuis la fosse par Hélène Blanic-Harismendy au piano, au pas parfois pressé. L'effort de concentration des artistes est louable, face à un public parfois distrait composé principalement de maternelles et de primaires pour cette première (une séance sur les quatre ouvertes à tout public). Vêtue d’un tutu orné et cravache à la main, Clara Leloup incarne la dompteuse Atala avec mordant, même si le rôle pourrait gagner davantage encore en théâtralité. D’abord assez fragile dans la voix (le rôle est longtemps un monologue), elle prend confiance une fois le premier air chanté et la venue des applaudissements du public, laissant à l’aigu perçant et ordonnateur le soin de sonner. Face à elle, Pierre-Emmanuel Roubet apparaît d’abord en Singe muet, dont l’agilité et les jeux très physiques avec le mobilier scénique sont une performance en soi. Masque retiré, l’acteur-chanteur gagne progressivement en naturel dans la voix comme en assurance face à l’instinct dominateur de son épouse. Reste un jeu perfectible, les temps forts de l’intrigue sabrés par des approximations de ton dans la voix.

Dans Pomme d’Api, Amélie Tatti apparaît assez étriquée dans son habit de servante, et montre une voix dont les aigus légers sont d’abord peu portants et rapidement coupés dans l’air de la bonne, avant de gagner en agilité (« J’en prendrai 1, 2, 3 »). Si le rôle est incarné, la voix peut gagner en homogénéité et en précision dans la diction. Vêtu d’un costume clownesque, Gustave apparaît sous les traits de Matthieu Justine comme un adolescent attardé aux gémissements débridés suite à sa rupture amoureuse. Il gagne en crédibilité en reprenant la main dans la reconquête de son aimée, et prend soin du dévoué « Consultez votre cœur » à l’adresse de Pomme d’Api en un chant legato et assuré dans les médiums. Antoine Philippot est un Rabastens survitaminé et déjanté, vêtu en costume rayé de bandes noires. L’agitation et la fougue du personnage sont portées jusqu’à l’outrance avec un jeu précipité, dont pâtissent les passages théâtraux où les mots sont parfois difficilement audibles. Le chant reste plus mesuré et juste dans l’expression, avec un grain de voix agréable et un effort dans la conduite des lignes.
Une production en tournée à l’adresse de tous les publics : Le Singe d’une nuit d’été pour les petits, Pomme d’Api pour les grands.
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