Messe à cinq voix de Byrd et Méditations dans les Jardins de William Christie
Dans le silence d’une église vendéenne bondée, éclairée par la seule lumière des chandelles, l’autel préside, tel un élément scénographique, à une scène élégante et spirituelle accueillant cinq solistes des Arts Florissants. Tout semble pensé pour que le spectateur soit transporté harmonieusement à travers musique, histoire, patrimoine et nature. Le concert propose deux œuvres de Byrd : Plorans plorabit et la Messe à cinq voix avec les tropes spécifiques de l’Assomption (la fête sacrée la plus proche du Festival).
En empathie avec les autres chanteurs, Paul Agnew dicte le tactus (mesure ancienne), et les cinq voix s’élèvent en brillant vers le ciel dans le jeu polyphonique et mystérieux de cet office. La voix de ténor, souple et sonore, de Paul Agnew donne l’incipit soliste des différentes parties de la Messe. Suspendant l’attention du public, la voix claire de la soprano Miriam Allan ne cherche pas à émerger par-dessus ses collègues, mais se mêle avec le timbre plus sombre et de caractère de la contralto Mélodie Ruvio également attentive à ne pas « déranger » le fil musical des autres artistes. L’autre ténor, Sean Clayton, avec son timbre clair, sait se fondre avec cette contralto, poursuivant le discours musical dans la justesse des notes et dans le mysticisme qui règne ce soir. L’église est remplie des sons purs et riches pour lesquels l’influente basse Edward Grint joue un rôle très important avec sa voix ronde et puissante, assurant l’implantation musicale. Les voix respirent ensemble et sont déterminées à ne jamais forcer l’intensité pour ne pas abimer la syntonie harmonique. Chacun est soliste, maître de sa technique et déploie ses lignes fuyantes jusqu'au morceau hors programme, un Ave Maria en chant grégorien (remontant vers les origines de la musique religieuse par cette forme musicale monacale à l'unisson). Le public en adoration témoigne sa reconnaissance envers les artistes avec de longs applaudissements qui se terminent uniquement lorsque les chanteurs quittent définitivement la scène où les chandelles continuent encore à vibrer.
Mais la soirée n'est pas tout à fait finie (comme la musique ne l'est jamais vraiment dans ce domaine) : selon l’usage du Festival, chaque soirée se referme sur un petit récital de musique sacrée. Le public est ainsi invité à quitter les lieux à son issue, sans applaudir, dans le silence, la méditation, le recueillement de musiques sacrées composées par Purcell (et les bougies qui s'éteignent). L'occasion d'apprécier Massimo Moscardo au luth, Marie Van Rhijn à l’orgue et de nouveau, en duo, la soprano Miriam Allan et la basse Edward Grint. Solistes, cette fois, ils peuvent épanouir encore davantage, la claire brillance qui déclame avec précision et tenue de souffle le texte anglais pour Madame, la puissance expressive à l'aise dans les phrasés liés comme dans le tempo accentué pour Monsieur. Vers l'a cappella conclusif : « Prends ton repos, ô mon âme ! Et en chantant, loue la miséricorde qui prolonge tes jours. Alleluia. ».