Noëls du Monde en Avignon
L’endroit sacré perd peu à peu de son silence pour laisser place aux dialogues et aux rires parmi l'assistance. Sourire aux lèvres, les artistes accueillent un public familial. Les voix douces se font même célestes pour ouvrir ce concert depuis les coulisses avec la polyphonie Renaissance anglaise a cappella (Ave Verum Corpus de William Byrd). Les jeunes choristes de la Maîtrise des Bouches-du-Rhône et de l’Opéra Grand Avignon (dirigée par Florence Goyon-Pogemberg) ainsi que du Chœur de chambre Asmara prennent ensuite place sur la scène spacieuse et sous les feux des projecteurs. Ils offrent un voyage à travers le temps et les cultures en trois parties, en trois Noëls : Noël classique (Cantates de Bach, Vêpres Solennelles d’un confesseur de Mozart), Noël romantique (Fauré, Gounod, Elgar notamment) et Noël traditionnel populaire. Le tout brasse les langues (français, latin, anglais, allemand) et chante la joie à travers le monde. Entonnés en toute simplicité, "Douce Nuit" côtoie Angelus Ad Virginem, le Cantique de Jean Racine composé par Gabriel Fauré (donné dans sa version pour chœur mixte et ensemble à cordes) impressionne par les pianissimi autant que par des soulèvements menant vers le légendaire "Hallelujah" extrait du Messie de Haendel.
Les phalanges chorales sont variées en âges (jeunes enfants, adolescents et chanteurs lyriques professionnels adultes), pourtant le résultat est homogène, le dynamisme et le professionnalisme sont universels. Les voix s’accordent et s'écoutent, attentives au résultat sonore. La concentration sur les partitions n'empêche pas le regard attentif porté au chef d’orchestre. Par sa direction fluide, celui-ci les guide avec une bienveillance qu'il dirige également vers le petit ensemble instrumental de huit musiciens chargé de l'accompagnement. Complice, ce petit orchestre réunit -sous l'égide de "Musique Sacrée et Orgue en Avignon" dont fait partie le chef Samuel Coquard- orgue, contrebasse, quatuor à cordes, hautbois et trompette dans des harmonies fondantes et fondues à l'acoustique des lieux.
Le
soliste soprano Luca Volfin (issu du chœur d’enfants de la
Maîtrise
des Bouches-du-Rhône) émeut
visiblement le public à
travers différents répertoires. Commençant par le
solo de la Cantate 147 "Jesus bleibet meine Freude" (Jésus que ma joie demeure) de Bach, suivi de l’Ave
Verum Corpus (Salut, vrai corps) d'Edward Elgar, repris par le chœur. Il se démarque aussi
dans le grandiose Laudate
Dominum (Louez l’Éternel) extrait des Vêpres Solennelles d’un Confesseur de Mozart. D’une
présence scénique appliquée,
d’une grande
écoute et attention envers le chef
d’orchestre et ses
camarades, il projette
une voix fluide,
juste et claire, sans
difficulté apparente.
Autre soliste de ce concert, plus âgée et toujours parmi la Maîtrise des Bouches-du-Rhône mais dans le Jeune chœur, la soprano Alia Hadjem assure seule le Panis Angelicus de César Franck ainsi que le célèbre Ave Maria de Gounod et de Bach, dont elle reprend le thème joué au violon par Sylvie Negrel, pour l'élever vers les hauteurs de l’église. Également très à l'écoute, sa voix s'élance sur un vibrato léger et aérien menant vers de longues tenues. De quoi percevoir une belle musicalité, malgré une présence scénique en retrait. Enfin, le baryton Guilhem Chalbos effectue une discrète intervention soliste de quelques mesures sur Le Messie. Le grave est bien timbré et s'épanouit vers le medium mais la projection reste feutrée.
Le concert se finit dans un unisson, symbole de réjouissance et de paix : le message qu’a voulu transmettre le programme de cette soirée.