La jeunesse d’Unikanti fit Phi-Phi à Massy
Après une Belle Hélène aboutie en 2017, Unikanti (ensemble composé de jeunes issus de la Maîtrise des Hauts-de-Seine) présente Phi-Phi de Christiné à l'Opéra de Massy, une opérette grivoise sans prétention (comme l’annonce le prologue) composée durant la Grande guerre et programmée pour être créée le 11 novembre 1918 (la création sera toutefois repoussée au lendemain pour cause de victoire militaire). Comme le clame le chœur final, les personnages typiques du vaudeville se livrent à des jeux de séductions au cœur de l’atelier d’un sculpteur athénien, Phidias, dit Phi-Phi. Les calembours suggestifs qui surgissent à chaque phrase donnent à cette opérette ses bulles de champagnes, si prisées dans le contexte tragique de sa création. Loin de l’inspiration d’un Feydeau, l’intrigue repose toutefois principalement sur ce seul ressort, qui s’essouffle du fait de la longueur de l’ouvrage et du peu d’autres surprises de la trame.
Dans sa mise en scène, Anne-Sophie Lépinay en tire pourtant le meilleur, parvenant à moderniser le contexte (ainsi que certains gags). Le décor contemporain (signé Silouane Kohler) est sobre et esthétique, bien mis en valeur par les éclairages ingénieux et mutins de Thomas Chelot. La troupe Unikanti, réjouissante de fraîcheur et de spontanéité, la seconde bien, apportant un théâtre glamour et pétillant. Sous la direction de Gaël Darchen, l’expérimenté Orchestre de La Seine fait remonter les bulles, tout en ménageant des passages d’une tendre nostalgie, notamment grâce au son ambré des cordes aigues. Il s’approprie parfaitement le comique musical, bruitant l’action aux cuivres et percussions.
Dans le rôle-titre, Charlie Guillemin use de son exubérance théâtrale pour dynamiser la pièce. Très sollicité vocalement, il bénéficie d'une voix bien posée et expressive, dotée d’une belle diction. Simon Bièche interprète Le Pirée d’un jeu théâtral abouti. Ses quelques interventions chantées montrent un timbre riche mais une ligne vocale à stabiliser. Julie-Anne Moutongo-Black, dans le rôle de Madame Phidias, use d’un débit trop rapide dans les dialogues pour être parfaitement compréhensible, mais son jeu de coquette faussement honnête convient parfaitement au personnage. Sa voix large offre un phrasé piqué et piquant, joliment vibré. Laure Barras incarne Aspasie de son timbre boisée, rond dans le medium et pur dans l’aigu, de sa projection franche et bien couverte et de son vibrato intense. Elle ponctue son chant d’un parler-chanter sensuel qui tire quelques rires du public. Mehdi Hennad apporte sa gouaille séductrice au Prince Ardimédon. Fier Don Juan en caleçon, il clame son texte avec assurance et offre une voix structurée dans son couplet. Enfin, Louis de Lavignère est le noble Périclès au port altier.
Les huit demoiselles dites « Petits modèles », qui posent l’ambiance dès le prologue en s’asseyant sur les genoux de ces messieurs du premier rang, apportent leur fraîcheur dans leur jeu scénique et leurs parties chorales. La qualité des quelques parties solistes reste cependant hétérogène d’une chanteuse à l’autre.
L’ensemble de la troupe conclut la pièce en chœur, parvenant à rester bien en place rythmiquement bien que le public tape alors dans ses mains sur un autre tempo.