La Grève se poursuit à l'Opéra de Lyon aussi
Il n'y en a pas que pour Paris ! Certes l'Opéra national de la capitale s'arroge près de 100 millions d'euros de subventions publiques (tandis que les 15 opéras en régions se partagent 28,5 millions d'euros en tout). Certes l'Opéra de Paris connaît, en proportion, une grève historique (la plus longue de son histoire, tous les opéras et ballets ayant été annulés entre le 5 décembre 2019 et le 25 janvier 2020, la reprise étant émaillée depuis d'annulations lors des journées de mobilisation nationale) et le déficit allant avec : près de 16 millions d'euros au total. Par comparaison, une représentation d'opéra annulée à Lyon engendre une perte d'environ 30.000 euros, tandis qu'à Garnier la somme s'élève à 150.000 euros et 350.000 euros à Bastille : la différence tient aux jauges (respectivement 1.100, 1.900 et 2.745 places) mais donc surtout au prix bien moindre des places en-dehors de la capitale.
Dans le monde lyrique aussi, la contestation sociale n'est pas que parisienne. Outre de nombreuses émissions et rendez-vous musicaux annulés à Radio France (donc toujours dans la capitale mais rayonnant sur des ondes inter-nationales), une représentation des Petites Noces (le 18 janvier dernier) a été annulée à l'Opéra de Rouen, les musiciens jouant pour l'occasion sur la place du Théâtre des Arts : comme leurs collègues parisiens (à noter que ce ne sont pas des chants révolutionnaires ou de libération qui ont été joués par les normands mais des extraits des Noces de Figaro, l'œuvre certes à leur programme ce jour-là mais aussi un message plus subtil et non moins éloquent se référant à la lutte entre classes sociales).
L'Opéra de Paris donne le la de la mobilisation car sa grève se prolonge tel un feuilleton quotidien. Les grévistes pouvant se déclarer jusqu'à leur prise de service, le public n'est prévenu que le jour même, parfois quelques heures avant ou moins, mais si l'Opéra de Lyon a subi infiniment moins d'annulations, sa première durant ce conflit a été littéralement annoncée au moment du lever de rideau, devant les spectateurs installés en salle le 18 décembre 2019 (notre précédent article).
Depuis, une seule représentation a été annulée : celle du 24 janvier 2020, jour de grève nationale, mais depuis le 30 janvier, les spectacles de Tosca (notre compte-rendu) sont précédés du Chant des esclaves (extrait du Nabucco de Verdi) entonné par les Chœurs et Orchestre de la maison, tandis qu'est diffusée une vidéo de la CGT Spectacle dénonçant une attaque contre les retraites et services publics, en montrant des images de mobilisation devenues célèbres : les musiciens de l'Opéra de Paris jouant Place de La Bastille, les danseuses interprétant Le Lac des cygnes sur le Parvis de Garnier, les actions dans la rue par des artistes de l'Opéra de Rouen, ou du Ballet de Lorraine, des interprètes de Radio France jouant dans le Hall de la Maison ronde, mais aussi ailleurs des enseignants, avocats, personnels hospitaliers jetant leurs affaires.
Vidéo accueillie, comme à Paris et ailleurs, par un mélange d'acclamations et de huées.
Dernier épisode en date : 20 sur 29 ouvreurs se sont mis en grève à l'Opéra de Lyon, ce qui a entraîné l'annulation de Tosca samedi 1er février 2020 (les ouvreuses et ouvreurs sont indispensables à la tenue du spectacle car, loin d'être seulement en charge du contrôle des billets, ils doivent en effet assurer l'information, l'orientation mais aussi participer à la sécurité du spectacle : restant prêt à alerter et intervenir durant la représentation en cas d'incident). Ces personnels souvent précaires avaient été particulièrement choqués de ne pas avoir été correctement informés, selon eux, par la direction concernant leur droit de grève à l'occasion du premier mouvement de cette contestation initié dans la maison.
Du côté de l'Opéra de Lyon, le message est le même qu'à l'Opéra de Paris, consistant à rappeler que la grève a des motifs nationaux et que les spectateurs sont prévenus dès que possible d'éventuelles annulations.