Aperghis, Marthaler et Keersmaeker primés à Venise
La Biennale de Venise a décerné un Lion d'Or à trois artistes d'exception ce matin : la chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker dans la catégorie danse, le metteur en scène Christoph Marthaler pour le théâtre et le compositeur Georges Aperghis pour la musique. Retour sur trois carrières marquées par l'opéra.
Christoph Marthaler, né à Zurich en 1951, étudie la musique en Suisse, puis à Paris auprès de Jacques Lecoq. Après avoir travaillé pour le théâtre en Allemagne et en Suisse, notamment à la direction du Schauspielhaus de Zurich, il fait son entrée dans le monde de l'opéra en mettant en scène Pelléas et Mélisande de Debussy en 1994 à Francfort, aux côtés du compositeur Sylvain Cambreling. Le public parisien rencontre son travail en 2007, lorsqu'il met en scène La Traviata de Verdi à l'Opéra Bastille de Paris, alors qu'il monte la même année Sauser aus Italien über Giacinto Scelsi pour le Festival de Salzbourg. Dès lors, Christoph Marthaler n'a eu de cesse de servir l'opéra. Katia Kabanova de Janáček au Palais Garnier en 2011, Tristan et Isolde de Wagner à Bayreuth, ou encore Wozzeck de Berg au Teatro Real en 2013, font parties de la dizaine d'opéra qu'il compte à son actif. Il mettra notamment en scène Le Voyage à Reims de Verdi à Zurich cet hiver.
Aimant se tourner vers des genres aussi différents les uns que les autres comme le jazz ou la musique indienne traditionnelle, la danseuse et chorégraphe belge Anne Teresa De Keersmaeker a fait quelques incursions discrètes dans le domaine de l'opéra. En 1998, elle met en scène Le Château de Barbe bleue de Béla Bartók, puis en 2004 le compositeur japonais Toshio Hosokawa lui fait confiance pour monter son second opéra, Hanjo, à La Monnaie de Bruxelles. Deux mises en scène subtiles et sensuelles à l'image de sa carrière. À noter que sa pièce chorégraphique Drumming, sur « Music for 18 musicians » de Steve Reich sera à l'Opéra de Lyon du 7 au 11 avril.
Quasiment autodidacte, né à Athènes en 1945, George Aperghis quitte sa terre natale en 1963 pour Paris, où il s'intéresse à la musique concrète de Pierre Henry et Pierre Schaeffer, ainsi qu'à la composition d'Iannis Xenakis. Dès sa première pièce La Tragique Histoire du nécromancien Hiéronimo et de son miroir en 1971, il développe une réflexion sur l'interaction entre texte et dramaturgie, qu'il mettra en question dans toutes ses œuvres qu'elles soient pour solistes, orchestrales, vocales ou chambristes. Pas étonnant donc que le compositeur se soit tourné vers l'opéra. George Aperghis en compose pas moins de cinq, à commencer par Histoire de loups en 1976. Il remporte le Grand Prix de la Critique grâce à Avis de Tempête, opéra électronique créé en 2004 à l'Opéra de Lille. En 2010, il reçoit une commande de l'État et créé l'opéra-bouffe Les Boulingrin d'après la pièce de Georges Courteline à l'Opéra Comique, mis en scène par Jérôme Deschamps. Il succède à Steve Reich qui avait reçu la distinction vénitienne l'année dernière.
(Crédits photographiques cover : © X. Lambours. Ga)