Phaéton à l’Opéra de Nice : Protée et Jupiter
Arnaud Richard nous présente les deux rôles qu’il incarnera : “Protée et Jupiter. Protée est un Dieu des mers gardien des troupeaux de Neptune, troupeaux d’animaux marins tels que des phoques. Il a la particularité d'avoir un don de prophétie. Or, il n’aime pas annoncer l'avenir et pour pouvoir lui soutirer ces informations il faut le surprendre pendant sa sieste à l'abri du soleil dans une grotte et le ligoter. Cependant, il a encore la possibilité de s'échapper en prenant de multiples formes animales, végétales, minérales. Clymène désireuse de connaître le destin de Phaëton va voir Protée.
Dans l’opéra de Lully, Protée apparaît d’abord chantant un air où il compare les tourments du sentiment amoureux aux risques de la mer. Puis il s’endort. Climène et Triton le réveillent et tentent de l’étourdir par des danses mais Protée, après de multiples transformations, se pose et se décide enfin à révéler le destin tragique de Phaëton dans un air très impressionnant. Malgré cet oracle terrible, Phaëton restera insensible et ne changera rien à sa prétention.
Protée n’apparaît qu’au premier acte de l’opéra mais ce doit être un moment marquant car il s’annonce la fin tragique au milieu de toute cette histoire d'amour et de pouvoir. Ma voix de baryton-basse s'y retrouve parfaitement dans cette tessiture où je peux pleinement projeter le texte et donner les couleurs noires, sombres, impressionnantes que le rôle suggère et que ma voix possède. Il faut directement marquer et impressionner l’auditeur.
Dans la mise en scène d’Eric Oberdorff, Protée qui a l’apparence d’une créature marine dégoulinante, comme couverte d'algues, ne doit pas avoir d'allure humaine mais un traitement chorégraphique doit montrer son polymorphisme et ses changements de caractère. Ce n’est qu’au moment de l’oracle qu'il se redresse. C’est donc un bel enjeu d’investissement physique pour moi. C’est ce qui me plaît sur la scène de l’opéra : créer des personnages physiquement marqués, différents de mon allure dans le civile et jouer avec. Et j’en aurai là une belle occasion.
Éric Oberdorff le confirme en ouvrant encore les perspectives mythologiques : “Protée est ce personnage, un peu étrange mais qu’on retrouve de manière récurrente dans les contes depuis des siècles : ces personnages qui peuvent être épris de magie occulte (ce qui existait encore à l’époque de Louis XIV avec des quêtes ésotériques). Il est difficile à cerner et en même temps touchant car il met les doigts sur des vérités et les exprime tel un oracle. Il est intimement lié avec le personnage de Triton (d’autant que les liens familiaux existent avec Climène : tout est lié et les personnages sont ainsi à la fois secondaires mais avec de vraies scènes, des scènes clés car elles permettent de comprendre ce qu’il se passe. Ils montrent et incarnent même la main du destin : s’ils étaient absents, il manquerait l’étincelle du drame, et ils permettent la compréhension des tenants, aboutissants et enjeux en indiquant l’avenir avec des pistes précises.”
“Jupiter, est pour sa part un rôle fulgurant mais néanmoins essentiel, comme tous les autres personnages de cette oeuvre”, conclut Éric Oberdorff tandis qu’Arnaud Richard conclut : “L'intervention de Jupiter est très brève à la fin de l'opéra et doit être tout aussi autoritaire et marquante car il précipite Phaëton dans sa chute tel le commandeur à la fin de Don Juan.”
Pour naviguer parmi les Airs du Jour de cette série, cliquez sur les liens ci-dessous :
1. Le Plateau héliocentrique
2. Phaéton
3. Climène
4. Théone
5. Merops et Saturne
6. Libye
7. Epaphus
8. Triton, le Soleil et la Terre
9. Protée et Jupiter
10. L’Orchestre et le Chant de Lully