Phaéton à l’Opéra de Nice : Libye, Princesse d’Egypte
Le metteur en scène Eric Oberdorff poursuit d’abord les présentations des personnages de Phaéton, avec cette fille du Roi d’Egypte Merops et amante d’Epaphus : “Libye est une femme amoureuse et puissante, peut-être meilleure que les autres pour lire son environnement (qu’elle connaît et où elle a toujours vécu). Elle voit les choses très clairement. Elle sait qu’elle peut être appelée à régner : elle a cette force et cette passion, on le voit de fait dans les moments de friction avec Théone dont elle reconnaît la fougue, mais tout en se raisonnant pour prendre des décisions dictées par le devoir.”
Chantal Santon Jeffery nous présente ce rôle qu’elle incarnera dans cette production niçoise : “Libye, fille de Merops, Roi d'Égypte, aime et est aimée d'Epaphus, fils de Jupiter et d'Isis. Son père lui choisit Phaéton comme époux, elle l'apprend au deuxième acte de la bouche d'Epaphus, mais a déjà pressenti dans une longue scène avec Théone au premier acte qu'Epaphus ne sera pas l'heureux élu. Elle est fiancée à Phaéton, assiste à l’acte III aux cérémonies devant le Temple d’Isis puis est témoin à la fin de la mort tragique du fils du Soleil.
Elle est une victime collatérale qui n'a pas vraiment son mot à dire mais par qui s'exprime une thématique connue de la tragédie classique : le conflit entre devoir et amour. Libye accepte son sort dignement, sans exprimer une quelconque rébellion. Elle permet à Epaphus, rival de Phaëton, de laisser entrevoir sa sensibilité et sa douceur et de justifier ainsi sa soif de vengeance, nourrie par son amour. Le conflit devoir/amour n'est pas l'unique thème de cette œuvre bien sûr, puisque Phaeton traite principalement du délire mégalomane de son personnage principal, aveuglé par son orgueil, et des conséquences désastreuses sur son entourage.
Libye est un rôle bien entendu tragique, la couleur est assez monochrome car elle est constamment dans la déploration, comme toute bonne princesse de la tragédie lyrique. Mais l' écriture de Lully lui réserve de très belles pages, et le traitement de la ligne de chant, surtout dans les récits, souligne particulièrement la noblesse et la vertu du personnage qui n’en est pas moins sensible. Fille de roi, elle est consciente de son devoir et du respect qu'elle doit à son père, au détriment de son intérêt personnel.
Même si les rôles qui m’ont été offerts dans le répertoire post baroque sont généralement lyriques et dramatiques, j'ai beaucoup chanté et enregistré ces dernières années dans le baroque français des rôles aigus et pyrotechniques, à quelques exceptions près (Iphise dans Jephté de Montéclair, Hermine dans Tancrède de Campra ou Sapho dans Les fêtes d'Hébé) donc je suis ravie d'avoir l'opportunité de chanter un rôle moins léger, qui correspond peut-être plus à mon tempérament scénique, même si j’adore aussi faire rire.
Il n'y a pas vraiment de difficultés vocales dans mon rôle, en tout cas aucunes auxquelles je n’ai déjà été confrontée, si ce n’est qu’il est très central, ce qui a l’avantage de faciliter la compréhension du texte pour l'auditeur : en effet le défi dans ce répertoire réside principalement dans la diction et l'art de la déclamation qui doivent être excellents afin de servir le théâtre et le génie de Quinault et Lully. Les quelques magnifiques ariosos exigent de la subtilité, mais jamais au détriment du texte”.
Véronique Gens chante la Libye de Phaéton avec Les Musiciens du Louvre de Marc Minkowski :
Pour naviguer parmi les Airs du Jour de cette série, cliquez sur les liens ci-dessous :
1. Le Plateau héliocentrique
2. Phaéton
3. Climène
4. Théone
5. Merops et Saturne
6. Libye
7. Epaphus
8. Triton, le Soleil et la Terre
9. Protée et Jupiter
10. L’Orchestre et le Chant de Lully