Otello de Rossini à Liège : vous avez dit Rossini ?
Rossini est surtout connu pour ses opéras-bouffes (Le Barbier de Séville et La Cenerentola parmi de nombreux autres exemples), mais le “cygne de Pesaro” comme il est surnommé a également composé un drame poignant d’après l’Otello de Shakespeare, en 1816 (soit 71 ans avant l’Otello de Verdi).
En plus des différences substantielles dans le livret et entre les mêmes personnages dans ces deux opéras, le chef d’orchestre Maurizio Benini qui dirigera cette production liégeoise y voit aussi “des moments opposés dans l’histoire de l’opéra italien. Si l’Otello rossinien introduit l’époque du grand mélodrame italien, l’Otello de Verdi signe la clôture de cette même époque. L’introduction des récitatifs accompagnés par tout l’orchestre, le finale tragique, le troisième acte développé comme un numéro musical seul et unique qui crée une grande arche sont les éléments qui font d’Otello version Rossini un opéra décidément novateur, non seulement dans la production de ce compositeur mais plus généralement pour le mélodrame italien.”
Cette grande arche, cette continuité musicale se retrouve dans des passerelles tendues entre le début de la partition et sa fin (et d’autres œuvres de Rossini), comme nous le démontre le maestro : “L’ouverture emprunte toute l’introduction du Turc en Italie. Ce n’est évidemment pas rare dans le processus créatif rossinien, mais dans cette ouverture d’Otello on peut percevoir des éléments rythmiques et mélodiques qui se retrouvent aussi dans le finale. L’ouverture devient ainsi partie intégrante de l’ouvrage et non plus un moment musical à part, déconnecté de tout le reste.”
En effet, difficile voire impossible de différencier les ouvertures composées par Rossini pour Le Turc en Italie (créé en 1814) et pour Otello (1816) au moins dans les deux premières minutes (hormis quelques subtils changements d’instrumentation et de timbre). Les deux pièces se séparent toutefois dans leur section rapide (typique de Rossini).
Le changement esthétique s’opère en particulier pour le chef avec le troisième et dernier acte : “Un chef d’œuvre absolu et d’une grande modernité. Rossini abandonne ici la structure classique récitatif-air-cabaletta (reprise) qui est présente dans les deux actes précédents, au profit d’un unique et très grand numéro musical caractérisé par une continuité dramatique et expressive.”
Retrouvez cette production du 19 au 31 décembre 2021 à l’Opéra Royal de Wallonie.
Pour naviguer parmi les Airs du jour de cette série, cliquez sur les liens ci-dessous :
1- L'Orchestre : vous avez dit Rossini ?
2- Des chœurs discrets mais essentiels
3- Le rôle-titre
4- Desdemona
5- Emilia
6- Rodrigo
7- Iago
8- Duels en duos
9- Le Gondolier
10- Le Sénateur Elmiro