Têtes blondes et Belle Hélène au TCE
Chaque année, le Théâtre des Champs-Élysées propose une adaptation pour enfants d’un opéra du répertoire. Il s’agit cette saison de la Belle Hélène d’Offenbach, interprétée par Alix Le Saux dans le rôle-titre, avec des solistes et membres du chœur Unikanti (le Chœur de chambre de la Maîtrise des Hauts-de-Seine). En ce lundi matin, c’est donc une salle pleine d’enfants et d’adolescents qui a ri devant les facéties du maître de l’opérette. Autant le dire d’emblée : la qualité d’écoute s’est maintenue presque jusqu’à la fin, preuve de l’intérêt suscité par la proposition. Rafraîchissant, ce public brille par sa spontanéité, applaudissant par exemple à la fin d’un récitatif, enjoué par le jeu de comédien de l’interprète de Calchas. Ce sont même des « houra ! » et des tapements de pieds qui ont retenti pendant les saluts.
La Belle Hélène par Gaël Darchen et David Thénard (© Maîtrise des Hauts-de-Seine)
De la bouche même des enfants, la principale raison de ce succès en est la mise en scène drôle et adaptée au public de Gaël Darchen et David Thénard (d'après la production originale de Julien Girardet) bien servie par l’engagement de ses interprètes. Dans la structure du décor du Retour d’Ulysse dans sa patrie (lire notre compte-rendu), quelques accessoires remodèlent la scène pour accueillir ce nouvel ouvrage. Des canapés gonflables se prêtent ainsi à un comique de répétition entre Hélène et son mari Ménélas qui déclenchent des rires réjouis dans l’assistance. Le roi trompé, très en vue, s’attire également les faveurs de son public par ses quelques pas d’une danse à la mode imitant les gestes d’un robot. Les personnages utilisent un argot actuel et se prennent en selfie. Le ténor arbore un t-shirt sur lequel est écrit « I love Paris » (référence au nom de son personnage, Pâris) et la lettre de Vénus est apportée par un mini drone, participant à cette recherche de modernité. Afin de tenir en une heure dix, les couplets des airs sont sélectionnés, et une partie des dialogues sont coupés. La trame du livret reste toutefois très fidèle à l’œuvre originale.
La Belle Hélène par Gaël Darchen et David Thénard (© Maîtrise des Hauts-de-Seine)
Alix Le Saux (entendue récemment dans Fantasio à l’Opéra Comique) offre un jeu scénique abouti, qui porte le velours de sa voix fluette, dont le tendre vibrato flotte dans l’air du théâtre. Elle est accompagnée de solistes de l’ensemble Unikanti dont les noms n’apparaissent pas dans le programme de salle. Saluons toutefois la voix flûtée et chaleureuse d’Oreste, le beau timbre de Calchas ou encore la voix structurée, exaltée par un phrasé empreint d’intentions théâtrales, de Ménélas.
Alix Le Saux dans La Belle Hélène (© Maîtrise des Hauts-de-Seine)
Le très bon Ensemble instrumental des Hauts-de-Seine est dirigé par Gaël Darchen, qui se voit obligé de ralentir considérablement les tempi pour permettre à ses interprètes peu aguerris de suivre le débit requis, notamment dans les finales d’actes. Cela nuit forcément à l’émergence de l’esprit d’Offenbach, dont les œuvres sont légères et faciles à écouter, mais redoutables à exécuter. À la fin, l’un des enfants, qui mettait pour la première fois les pieds à l’opéra, demandait : « on peut revenir demain ? », preuve que l’objectif est atteint. Il lui faudra toutefois patienter jusqu’en mars prochain : une réduction pour enfants du Barbier de Séville vient en effet d’être annoncée par le théâtre parisien (lire notre présentation de la saison 2017/2018 du TCE).