La confirmation de jeunes talents lyriques à Salon-de-Provence
Retrouvez les compte-rendus des soirées précédentes du Festival :
- Carmen de Bizet
- Soirée Mozart / daPonte
Une rangée d’espoirs, par tessiture, est repérée chaque année par la pianiste Fabienne Di Landro, chef de chant de l'Opéra de Marseille, accompagnatrice subtile aux doigts d’orchestre. Cinq chanteurs, qui présentent tous un profil singulier, interprètent des airs, des duos et quelques ensembles, connus et moins connus, d’une rangée de compositeurs, dont Mozart, Rossini, Donizetti, Verdi, Puccini, Offenbach, Bizet ou encore Massenet. Leur succession est annoncée et éclairée par le président de l’association Mezza Voce, Jacques Bertrand, commentateur passionnément engagé dans cette entreprise de transmission de l’art lyrique que constitue le Festival de Salon.
Il s’agit, côté voix féminines, de la soprano Stéphanie Portelli, laquelle a entamé un travail plus poussé de soprano lyrique et de la mezzo-soprano, Marie Pons, passionnée de théâtre. La sélection masculine est davantage représentée, avec le ténor Rémi Beer-Demander, lequel a développé sa voix de haute-contre, le baryton Guilhem Souyri, trompettiste de formation, enfin le baryton-basse Antoine Abello, multi-instrumentiste (violon, cor, percussions), à laquelle s’ajoute un parrain surprise : le ténor brésilien Max Jota, solaire et enveloppant.
La soprano Stéphanie Portelli, en Louise, Mimi (La Bohème) ou encore Juliette, aborde leurs airs les plus difficiles, tout en retenue puis en intensité, avec des changements de couleur choisis et perceptibles. Ses aigus se fusèlent progressivement dans le chant mezza²-voce, tel un fil vocal frémissant. La mezzo-soprano Marie Pons confère à ses rôles très contrastés (L’Italienne à Alger, La Périchole, Carmen) un jeu scénique efficace, dans le drame comme dans la jubilation. Le grain de gorge de ses mediums s’épanouit sans mal vers des graves teintés d’ombre.
Le ténor Rémi Beer-Demander se souvient de la couleur particulière de ses aigus pour interpréter ses sérénades d’amoureux (Roméo, suivi d'Almaviva dans Le Barbier de Séville). Son instrument semble privilégier à cette fin l’expression et l’articulation à la puissance et à la projection. Le baryton Guilhem Souyri a un timbre singulier, aux strates multiples, qu’il s’emploie à « composer » au cours de ses rôles égrenés depuis L’Élixir d’amour jusqu’à La Bohème. Le baryton-basse Antoine Abello impose sa prestance naturelle, sa diction soignée et son legato soutenu dans les rôles à l’énergie caractérisée d’Offenbach, Massenet et Bellini. Le puissant ténor Max Jota se glisse dans la programmation jusqu’à donner la réplique à ses partenaires, en les enveloppant de son métier. Ses gestes sont parfaitement maîtrisés dans l’autodérision comme dans l’épanchement amoureux, sa projection semble apte à remplir les plus grands espaces scéniques, tandis que son timbre, ouvrant de multiples perspectives sonores, donne une leçon de construction dramatique ainsi qu’un moment de bel canto d’absolu, (Tosca, La Bohème, Werther). Son legato unifie l’être lyrique jusqu’au salut final.
Le public est de plus en plus nombreux à assister à cette troisième séquence du Festival (après l’opéra et le concert lyrique), qui vient clore et non ouvrir, pour la première fois, cette édition.